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« En 1972, j’ai eu la vie sauve grâce aux Tutsi »

Aujourd’hui, des photos traumatisantes des restes humains exhumés un peu partout au Burundi prouvent que des milliers de vies ont été fauchées. Pourtant, à cette époque, certaines personnes vont miraculeusement échapper à la mort, grâce à ceux de l’autre camp. Témoignage de Bernard Heka, un Hutu de Kibimba, commune Giheta, province Gitega.

Quand la crise de 1972 éclate, Bernard Heka, fonctionnaire depuis septembre 1964, est directeur de l’École Primaire Kwisumo, commune et province Ruyigi, à  16 km du chef-lieu provincial. Il y représente l’Église évangélique des Amis.  

Le 2 mai 1972, l’administrateur communal de Ruyigi, un Tutsi, tient une réunion des chefs du personnel. « Son message  était centré sur la situation dans le pays. Il nous a informés que des mulelistes ont attaqué Rumonge, qu’ils seraient aussi à Gitega et nous a intimés de rester vigilants », se rappelle Heka. 

En cas de réunion à Ruyigi, Heka dînait chez Jean Wilson Makokwe, Tutsi, gouverneur de Ruyigi. « Nous avions tissé des liens amicaux. Nous étions tous protestants et originaires d’autres provinces ». Pour se rendre à ces réunions, il parcourait 16km, et se rafraîchissait chez son ami.

Ce jour-là…

Comme d’habitude, vers 15 heures, il va chez le gouverneur pour récupérer son vélo. Un message inquiétant lui sera livré : « Heka, ta gestion me sera difficile. » Et là, il va comprendre que quelque chose se trame. Sans trop chercher à savoir pourquoi, Heka va rebrousser chemin vers Kwisumo. 

Et parmi les instituteurs sous sa responsabilité, il y avait une Rwandaise, d’origine tutsi aussi, enseignante en  5ème année était proche de presque tous les administratifs. Quand il se présente au travail le 3 mai, elle va se pointer dans son bureau pour l’avertir du danger imminent : « Directeur. Il n’y a pas de problème entre nous. Tu me donnes facilement la permission. De toutes les façons, vendredi, ils vont venir t’arrêter.» Et d’ajouter : « Ton arrestation m’affecterait.»

Heka en prend bonne note. Pour étoffer ses propos, cette institutrice lui montrera une note de l’administrateur sur laquelle figuraient les noms de quatre instituteurs dont un certain Binyoma, Kibinakanwa, … et celui du directeur.  

Pour se donner le temps de vérifier si les propos de Karenzi sont vraiment véridiques, Heka ne va pas prendre le large. Il déplace ses dossiers administratifs dans le bureau d’un missionnaire. 

Vendredi, très tôt le matin, il s’installe dans cet autre bureau. « Autour de 10 heures, l’administrateur vient à bord de son VW blanc. Il salue Ancille. Ils échangent des mots. Je les observais à partir du bureau du missionnaire. »  Sans Bernard Heka, l’opération d’arrestation est annulée. 

« Kuruha inda »

Le lendemain, cette fois-ci, le coup ne sera pas raté. « Autour de 5 heures, j’étais dans mon bureau. J’ai planifié le travail et j’ai affiché une note de service. Et je me suis retiré dans les hauteurs de Kwisumo pour observer tout mouvement à mon école »,

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