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Rwanda: la mémoire du génocide, pour la génération suivante

Un quart de siècle s’est écoulé depuis le génocide des Tutsis, qui a fait entre 800 000 et 1 million de morts en 1994 au Rwanda. Comment les adultes qui ont traversé cette tragédie du XXe siècle en parlent-ils à leurs enfants ? Des membres de la communauté rwandaise de Bruxelles témoignent.

Irène, 33 ans, appartient à une diaspora rwandaise estimée à 30 000 personnes en Belgique. Elle revient tout juste, en ce début avril, de Kigali. « C’est mon pays », dit-elle, même si elle est Belge et a grandi à Bruxelles, où elle vit toujours. « Les gens au Rwanda parlent beaucoup plus librement du passé que nos familles à Bruxelles, pour qui le génocide représente un vrai tabou, observe-t-elle. Comme si le temps était resté figé dans les années nonante, alors qu’il s’est écoulé au Rwanda, où un travail s’est fait ». Elle ne parvient pas à franchir le seuil du Mémorial du génocide à Kigali, malgré les encouragements de ses amis au Rwanda : « Je ne sais pas dans quel état je pourrais en sortir », dit-elle.

Blocage sur le kinyarwanda

Irène avait 8 ans en 1994. Elle se souvient de la sidération de ses parents devant le poste de télévision, à Bruxelles. « J’ai fait un blocage sur le kinyarwanda. Je ne voulais pas parler cette langue qui se chuchote et par laquelle déferlaient les mauvaises nouvelles. » Enfant, elle a aussi eu très peur pour sa mère, partie comme d’autres, dans les mois qui ont suivi le génocide, pour rechercher des disparus. « Certains ne sont jamais revenus », explique-t-elle.« Ils ont été tués pendant leurs recherches ». Alors que le silence plane dans sa famille, elle remarque qu’au Rwanda, « une solidarité se manifeste à l’égard des rescapés. S’ils ont des comportements bizarres, ils sont pardonnés et protégés par leur entourage, qui les comprend ».

Désiré, chauffeur de taxi arrivé en Belgique en 1996, à l'âge de 11 ans, sait qu’il provoque un malaise chez ses enfants, à cause de son refus de retourner au Rwanda. « Je n’y ai pas remis les pieds depuis que j’ai perdu presque toute ma famille. Je laisse mes enfants et ma femme y aller. Je les accompagne jusqu’à Nairobi, où je les attends. » Issu d’une famille hutue dont les membres ont été tués durant le génocide, il n’entre pas dans les détails quand ses enfants lui posent des questions, par crainte de les troubler. « J’ai voulu préserver leur insouciance, et attendu qu’ils soient grands pour leur en parler. Si je n’avais rien dit, ils me l’auraient reproché plus tard. »

La question des jeunes : pourquoi ?

Les adolescents à qui Didier Kabalira, 46 ans, enseigne le kinyarwanda et l’histoire du Rwanda à Bruxelles posent tous la même question : « Pourquoi ? Pourquoi est-ce que des extrémistes ont eu cette liberté de pouvoir massacrer les gens au vu et au su de tout le monde ? Ils se demandent aussi si ça peut arriver en Belgique... » Les cours sont dispensés par l’association Diaspora rwandaise de Belgique (DRB Rugari), lancée en 2011 pour promouvoir la langue et la culture rwandaises, à une classe de 20 à 30 personnes de plus de 12 ans. « Des enfants en parlent de temps en temps à la maison, mais en les mettant ensemble, ils osent poser les questions qu’ils ne poseraient pas à leurs parents, parce qu’ils savent qu’ils ont été directement victimes. »<...   

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