Le microcosme politique burundais continue d’enrichir son petit dictionnaire. Lors de ces élections du 20 mai, je n’ai pas été surpris de voir surgir des expressions et tournures originales, sans oublier des mots jusque-là inconnus. Ouvrez ici à la page « élections 2020 » et retenez bien les mots et expressions ci-après.
Shutdown numérique
Le prétexte était tout trouvé : lutter contre les fakenews afin de préserver la sécurité nationale. Nous avons eu droit ainsi à un shutdown numérique. Une expression qui donne tous les droits à la raison d’État. Cela signifie que l’État s’autorise à commettre certaines infractions dans l’intérêt du régime. Par exemple, Internet et les réseaux sociaux peuvent être coupés pendant plusieurs jours sur toute l’étendue du pays pour des raisons sécuritaires. Pourquoi pas alors au cours des élections ?
Observateurs internationaux
Le terme a un synonyme. « Colons » dans le jargon habituel. Les élections de 2020 ont été les premières qui se sont déroulées sans observateurs internationaux. Avaient-ils un rôle à jouer sur ce théâtre des opérations que l’on appelle bureau de vote ? Je n’en sais rien. Mais, selon le dictionnaire politique burundais actuel, deux choses sont sures. D’un, le peuple burundais est majeur et n’a plus besoin de baby-sitters. Et de deux, la souveraineté nationale oblige. Quoi d’autre ?
Covid-19
Voilà bien un mot qui s’est invité comme une épée de Damoclès, planant au-dessus des élections de 2020. Coronavirus oblige, c’était la première fois qu’on voyait des agents électoraux avec des masques comme si on était à l’hôpital. Alors qu’on était habitué à se laver après le vote pour faire disparaître l’encre indélébile, cette fois-ci, on s’est mouillé les mains avant le vote. Le mot est synonyme d’épouvantail puisqu’il a même empêché les Burundais de la diaspora à voter. Et le long de ces élections, il a créé une polémique dont le degré devrait pousser les personnes et organisations chargées de la riposte, à juger de l’efficacité de leurs actions.
Autofinancement
Cela aussi, les élections de 2020 furent les premières à être organisées sans aide internationale. Finie la maternité occidentale avec leurs financements sourcilleux. L’appel à contribution volontaire pour la levée de fonds a eu l’effet escompté. Le 20 mai l’a bien témoigné. Sauf qu’en cours de chemin, le volontarisme a pris l’apparence d’obligation. Le dictionnaire le définit comme un devoir de sauvegarde de la souveraineté nationale. Un signe éloquent de l’indépendance, comme le dictionnaire économique burundais le signale dans la rubrique de l’indépendance budgétaire. Mais, à quel prix ?
Triple scrutin
Eh oui, pour la première fois au Burundi de Nyaburunga, une seule élection regroupait trois élections. La présidentielle, les législatives et les communaux. Pour le pays et les partis politiques, c’est une aubaine. La tenue de ces trois élections le même jour a permis de gagner du temps et des moyens financiers. Cependant, il suffit d’écouter à la RTNB le taux des bulletins nuls et abstentions pour comprendre comment l’usage du bulletin unique a été un calvaire pour le citoyen lambda.
Avez-vous recensé d’autres mots du dictionnaire politique burundais ? Dites-les nous en commentaires.