Avec un déficit de 189,2 milliards de Fbu, dans le contexte d’une économie frappée du gel de la coopération, le gouvernement burundais peut-il financer lui-même son budget tel qu’il le prétend ? Avec quelles ressources? Analyse.
Quelques chiffres pour commencer. Jusqu’en 2015, l’aide étrangère représentait plus de 50% du budget national. Aujourd’hui, le Burundi parviendrait à financer lui-même son budget à plus de 80%. Le projet de loi de finances exercice 2019-2020, dont l’analyse est attendue sous peu à l’Assemblée nationale, mise sur un taux d’indépendance budgétaire de 83,6%. Il était de 81,2% pour l’exercice 2018/2019.
Prosper Niyoboke, enseignant au département des sciences économiques et de gestion à l’Université du lac Tanganyika, ne nie pas les capacités du gouvernement burundais à financer lui-même son budget à raison de 83% tel que prévu. «Il y aura l’accroissement de la mobilisation des recettes internes par l’augmentation du taux de la pression fiscale».
Recours à la dette intérieure
Autre stratégie, il parle de l’élargissement du champ d’application des droits d’assise sur certains produits importés (lait, boissons alcoolisées, véhicules et leurs accessoires, etc).
Cet universitaire estime que le gouvernement pourrait aussi penser à l’imposition de certaines catégories de Burundais jouissant de certains avantages sans raison.
Personnellement, je me dis qu’un budget avec un déficit pareil ne pourra pas profiter aux Burundais en ce moment où le pays est confronté au gel de la coopération par ses partenaires d’une part et du marasme économique d’autre part.
Ainsi, les autorités feront recours à l’endettement intérieur pour financer le budget et le déficit. Une situation dont le pays ne peut pas bénéficier car l’État, contractant des dettes intérieures pour ses affaires courantes, les opérateurs économiques vont manquer de moyens pour investir. Seul un budget d’investissement pourra profiter aux Burundais et au Burundi.
Quelques données factuelles
Le Conseil des ministres du 3 avril dernier a statué sur de «nouvelles mesures» en vue d’élargir l’assiette fiscale. Notamment la lutte contre la fraude et l’évasion fiscale, le renforcement du recouvrement des arriérés, et la maîtrise des exonérations.
Au sujet de cette dernière rubrique, il était grand temps. Dans la loi des finances exercice 2017 dont le rapport a été rendu public par la Cour des comptes, pour des prévisions d’un montant de 18 milliards d’exonérations, l’exécution aurait dépassé jusqu’à un taux de plus de 600% selon le président de l’Olucome.
Malgré la baisse du niveau de vie des Burundais, les ressources vont crescendo. Avec 1.237,1 milliards de Fbu pour l’exercice 2018-2019, celles prévues dans le projet de loi de 2019-2020 sont estimées à 1.327,1milliards de Fbu. Soit une augmentation de 7,3%.
Cependant, le même projet de loi fait état des charges qui augmentent. Elles passent de 1.400,7 milliards de Fbu en 2018-2019 à 1.516,2 milliards de Fbu pour l’exercice 2019-2020, soit un accroissement de 8,2%.
Autre point qui n’est pas des moindres, le déficit global du budget général de 2019-2020 s’élève ainsi à 189,2 milliards de Fbu contre 163,5 milliards Fbu pour l’exercice 2018-2019, c’est-à-dire une augmentation de 25,7 milliards de Fbu.