Les prix du ciment sont variés. À Bujumbura comme à l’intérieur du pays, le sac de 50kg s’achète entre 26 et 29 mille voire plus de 30.000Fbu au lieu de 24.500Fbu officiellement fixés. Malgré les réactions des autorités burundaises, mettant en garde les spéculateurs, la situation ne change pas. Pourquoi ?
Depuis le dernier semestre de l’an 2019, l’on assiste à la flambée répétitive des prix du ciment fabriqué par la cimenterie BUCECO. Sur terrain, certains commerçants détaillants parlent d’une fixation de prix influencée par le prix d’achat des commerçants grossistes. D’autres accusent la société BUCECO de produire une faible quantité de ciment. « Pour avoir du ciment, on doit payer un commissionnaire. Mais cela n’empêche qu’on l’achète à un prix élevé, ce qui se répercute sur nos prix de vente », confie un commerçant détaillant de Carama.
La société Burundi Cement Company (BUCECO) quant à elle, balaie du revers de la main ces accusations. Elle parle d’une production suffisante. « Nous sommes au courant de spéculations sur la commercialisation du ciment que ce soit le ciment de type 32.5 et de type 42.5. Mais ce n’est pas de la faute de la société BUCECO », explique Verra Izere, assistante du directeur général de cette société.
Des discours officiels sans effet
Au mois d’août dernier, le Conseil National de Sécurité, à travers le Lieutenant Général Silas Ntigurirwa, alors secrétaire permanent, avait recommandé aux services concernés, surtout le ministère du Commerce, d’identifier les commerçants spéculateurs pour qu’ils soient punis conformément à la loi. Plus tard, le président de la République, dans la conférence publique du 26 décembre de l’année dernière, a mis en garde les spéculateurs sur le ciment les qualifiant « d’ennemis de la nation ». Le ministère du commerce a effectué des visites dans le pays après la recommandation du Conseil national de la sécurité. Il a même fixé des délais définitifs pour couper court à ces spéculations.
Le ministre de l’Intérieur, dans sa correspondance du 19 novembre adressée aux gouverneurs de province, a recommandé d’user de toutes leurs forces pour arrêter les spéculations autour du ciment. « Nous avons constaté que les prix officiels du ciment fabriqué par BUCECO ont été violés. On ne pouvait pas tolérer cette situation, qui asphyxie la population, en tant qu’autorité administrative », explique Tharcisse Niyongabo assistant du ministre de l’Intérieur. Cette autorité espère que les commerçants se sont ressaisis car « aucun commerçant spéculateur n’a été attrapé ». Il appelle les acheteurs à dénoncer ce comportement des vendeurs du ciment de Buceco.
Le Parlement perd la danse dans l’affaire
Le Parlement qui contrôle l’action gouvernementale ne se retrouve pas également dans cette cadence. Selon le sénateur Martin Ninteretse qui qualifie la situation de sécuritaire, ce n’est pas la cimenterie BUCECO qui fait respecter les prix officiels du ciment. Les différentes autorités burundaises, à commencer par les ministres jusqu’aux élus collinaires, doivent s’impliquer dans le respect de ces prix. Il propose le retrait des commerçants spéculateurs dans le circuit de la commercialisation du ciment. « Ce n’est pas le rôle du Parlement de faire respecter les prix. Son rôle est plutôt de contrôler si la loi est respectée. Si ce n’est pas le cas, on convoque le ministre concerné. Où sont passées les institutions chargées de faire respecter les prix officiellement fixés ? », s’interroge cet élu du peuple dans une émission en synergie des médias du 30 janvier 2020.
Au niveau de l’Association Burundaise des Consommateurs, l’on trouve que la commercialisation du ciment est devenue compliquée. Pierre Nduwayo, président de l’ABUCO, s’exprimant au cours de cette même émission, invite la population à ne pas céder à ces spéculations mais plutôt à dénoncer les commerçants spéculateurs.
Mais dans tous les cas, si les discours officiels n’ont aucun effet, il faut se demander à qui profite cette situation.