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Burundi : à qui incombe la responsabilité de collecter les bouteilles en plastique ?

Entre le consommateur, l’entreprise et l’État, qui est en première ligne dans la lutte contre la pollution des bouteilles en plastique ? Réponse avec Albert Mbonerane de l’ACVE, Action Ceinture Verte pour l’Environnement.

J’avais voulu commencer ce billet en demandant à vous qui lisez ce texte où est-ce que vous jetez les bouteilles plastiques après la consommation d’une eau minérale ou autres limonades comme on les aime souvent. Mais je vous épargne la question. Cela parce qu’un ami à moi a répondu à votre place (si du moins vous en convenez). 

Pas plus tard que cette semaine, en plein centre-ville de Bujumbura, vers 14h, alors qu’un soleil de plomb pesait sur la capitale économique, un ami à moi jugea bon de s’acheter une bouteille, plastique, d’eau bien fraîche. Il la but d’un coup sec, tellement la soif allait l’assommer. Après cela, il jeta la bouteille par terre et s’en alla. À la question de savoir s’il ne voyait pas qu’il contribuait à la pollution de la ville, sa réponse fut toute sèche : « Akazi karagabuye (les responsabilités sont partagées, ndlr) ! Ce n’est pas à moi et d’acheter l’eau dans les bouteilles et de savoir la finalité de ces dernières », dit-il. Mais alors pour qui est-elle cette obligation ?

Responsabilité partagée

« La responsabilité incombe à tout le monde », nous dit l’Ambassadeur Albert Mbonerane de l’ACVE, Action Ceinture Verte pour l’Environnement. D’abord au niveau des consommateurs qui se disent : « Je consomme l’eau, je jette la bouteille n’importe où, la destination finale m’importe peu ». C’est par là d’ailleurs que certaines personnes viennent récupérer ces bouteilles, les lavent et vont les utiliser dans d’autres activités comme la vente de l’huile de palme ou du miel pour ne citer que cela ou utiliser ces bouteilles pour puiser de l’eau, surtout les enfants. Cela se fait soit par ignorance, soit par pauvreté. 

« Une fois les bouteilles étalées à l’air libre, suite à la chaleur et/ou la température, leur nature va changer avec un début de décomposition et les matières issues de ces bouteilles vont se mélanger avec du miel ou de l’huile…et nécessairement des effets néfastes sur la santé… Cela alors que les bouteilles sont supposées être à usage unique », regrette Mbonerane. 

Ensuite et surtout, c’est la responsabilité des entreprises. D’ailleurs à ce sujet la, loi est claire. L’article 7 du décret no 100/099 du 08/08/2018, portant interdiction de l’importation, de la fabrication, de la commercialisation et de l’utilisation des sachets et d’autres emballages en plastiques stipule : « Les déchets en plastiques, y compris les bouteilles et les flacons en plastiques sont retournés chez les fournisseurs qui en assurent le stockage, le recyclage ou la valorisation ». Mais cela n’est pas encore fait au Burundi, regrette l’Ambassadeur.

Peut-être parce qu’on a donné un délai de grâce de 18 mois (qui expire au 08/02/2020) aux entreprises pour pouvoir se conformer à cette loi, veut nuancer l’activiste environnemental avant poursuivre :« C’est comme si les entreprises ne s’en souciaient pas ».

La part de l’État

C’est enfin la responsabilité de l’État qui devrait assurer la mise en application des diverses lois car, selon Mbonerane, il y a une bonne action sur le plan légal, mais faut-il que ce soit mis en pratique. Pour lui, « il faut mettre en place un mécanisme de récupération des bouteilles plastiques par les entreprises sous l’impulsion du gouvernement. Et comme les entreprises sont connues, si demain on trouve une bouteille dans la nature appartenant à telle entreprise, celle-ci devrait être poursuivie ». Et c’est là que la police de l’environnement, tant souhaitée par l’ancien ministre, aurait tout son rôle, même si aujourd’hui elle se fait attendre. Celle-ci, pour assurer le respect des normes environnementales, se baserait sur le « principe pollueur-payeur », comme stipulé à l’article 36 de la loi no1/02 du 26 mars 2012 portant Code de l’eau au Burundi.

Autres solutions alternatives

Les entreprises utilisant les bouteilles plastiques pourraient changer cela et commencer à utiliser les bouteilles en verre à l’exemple de la Brarudi, nous dit l’Ambassadeur Mbonerane. « C’est ce qui est en train d’être fait en Allemagne et cela facilite la collecte de ces bouteilles ».

L’autre mesure qui pourrait aider surtout dans la collecte de ces bouteilles plastiques serait d’augmenter, à l’achat, le prix d’une bouteille, de 200FBU par exemple, laquelle somme serait remise au consommateur une fois avoir acheminé la bouteille à un centre de collecte qui serait établi. L’autre alternative qui faciliterait cela serait la mise en place des poubelles publiques. Mais cette fois-ci, il faudrait bien spécifier quelle poubelle va accueillir quel type de déchets et un tri qui commencerait dès la maison et pourquoi pas un prix pour un bon tri comme dans ces villes

Mais tout cela ne sera possible que lorsque les entreprises prendront conscience qu’elles sont des « pollueurs » et qu’elles s’investissent à travers des mécanismes de collecte/récupération des bouteilles pour des fins de recyclage, « sinon, ce serait déplacer le problème d’une décharge à une autre ». C’est ce qu’aurait compris l’entreprise Liquids qui lance un « programme de recyclage qui sera bien fonctionnel d’ici peu », comme me le dira un cadre de l’entreprise.

Alors après avoir lu ça, vous répondrez toujours comme l’ami-là ?

 

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