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Burundi : La hausse des prix sans révision des salaires, un phénomène inquiétant

Le Burundi traverse une grave crise économique qui affecte profondément la vie quotidienne de ses citoyens, notamment les fonctionnaires, dont les salaires n’augmentent pas avec la hausse des prix. Bien que l’économie enregistre une légère croissance, le gouvernement peine à augmenter les salaires en raison de faibles revenus fiscaux et d’une gestion inefficace des impôts.

Le Burundi, dont le slogan est « chaque bouche ait à manger et chaque poche de l’argent », traverse une grave crise économique qui affecte profondément la vie quotidienne de ses habitants. De la pénurie prolongée de devises à la dévaluation de la monnaie, en passant par le manque de carburant, cette situation perturbe considérablement les importations et touche pratiquement tous les secteurs du pays.

En l’absence d’un ajustement salarial, les mesures prises par le gouvernement pour réformer les prix des produits de première nécessité ont eu un impact important sur le quotidien des fonctionnaires. Justin Mbayiwimana, médecin gynécologue-obstétricien à l’hôpital Clinique Prince-Louis Rwagasore, a été contraint de renoncer à certains de ses projets et de suspendre ses activités de loisirs.

« En raison de la hausse du coût de la vie, notamment des dépenses liées aux besoins de base, nous avons dû renoncer à certains de nos projets. Sur le plan nutritionnel, nous consommons rarement de la viande ou du poisson, car notre budget ne le permet plus, ce qui présente des risques pour notre santé. De plus, nous avons abandonné nos activités de loisirs », explique-t-il.

Lire : Financement des économies africaines: quels résultats ?

Le président de la Confédération des syndicats du Burundi, Célestin Nsavyimana, dénonce l’absence d’une politique salariale adaptée à la hausse des prix, ce qui affecte les familles des fonctionnaires publics. « Au Burundi les salaires sont insuffisants pour les employés, car le pays ne dispose pas d’une politique salariale adaptée à la hausse des prix. Ainsi, les salaires peinent à suivre l’augmentation du coût de la vie, ce qui engendre des difficultés financières pour de nombreux travailleurs », a-t-il déclaré, le 1er mai 2024.

Selon des informations provenant du Ministère de la Fonction Publique, du Travail et de l’Emploi, relayées par son porte-parole, le gouvernement déploie tous ses efforts pour mettre en place des mesures visant à améliorer les conditions de vie de l’ensemble des citoyens burundais, y compris les fonctionnaires.

Augmentation des salaires des fonctionnaires, une question de production et de collecte des taxes et impôts

Classé 187e sur 191 pays selon l’indice de développement humain, le Burundi enregistre un léger progrès en matière de croissance économique. Selon les prévisions du FMI, la croissance réelle du PIB burundais devrait atteindre 2,7 % en 2023, contre 1,8 % en 2022 et 3,1 % en 2021.

Malgré cette amélioration, le pays peine à augmenter les salaires des fonctionnaires en raison de ses revenus encore faibles. Patrice Magnus Nyandwi, Directeur de l’Administration du Travail et des Relations Professionnelles et porte-parole du MInistère de la Fonction Publique, du Travail et de l’Emploi, précise que l’État burundais souhaite améliorer les conditions de son personnel. Toutefois, il souligne que les fonctionnaires doivent aussi fournir un travail de qualité, car le salaire résulte directement de la production.

« Lorsque la production est insuffisante, il est impossible d’augmenter les salaires », souligne-t-il, tout en expliquant que l’État ne peut pas répondre à tous les besoins des fonctionnaires. Selon M. Nyandwi, ces derniers devraient s’organiser de manière à diversifier leurs sources de revenus après leur journée de travail, en créant des revenus passifs.

Pour  Jules Henri Poncelet, économiste belge, il estime que pour augmenter les salaires, l’État doit veiller à une collecte efficace de toutes les taxes et impôts. « Pour augmenter les salaires des employés, il faut d’abord que l’État encaisse correctement toutes les taxes », précise-t-il. « Cela se fait-il correctement ? », s’interroge-t-il. « J’en doute », se répond-il, citant à titre d’exemple les commissionnaires qui gagnent beaucoup d’argent mais qui ne paient pas d’impôts.

Le mardi 17 décembre 2024, le président Evariste Ndayishimiye a ordonné à l’Office burundais des Recettes (OBR) de recouvrer toutes les recettes fiscales non perçues d’ici le 31 décembre 2024, sous peine de sanctions. Cette décision fait suite à un rapport mettant en évidence des tensions avec certains contribuables refusant de payer leurs impôts.

Le gouvernement burundais face à des défis majeurs pour stimuler la croissance économique

Selon l’expert en économie Jules Poncelet, le climat des affaires au Burundi reste défavorable, en raison de l’absence d’infrastructures routières, de la pénurie de carburant, du manque de devises nécessaires pour soutenir les activités économiques et de l’insuffisance de l’électricité.

« Il est essentiel que le gouvernement commence par développer les infrastructures routières, garantir l’approvisionnement en carburant et mettre en place des prévisions adéquates en devises et augmenter la puissance de son énergie », souligne-t-il.

Dans un communiqué de presse publié en juin 2024 sur son site web, la Banque mondiale déclare que la mauvaise qualité des services d’électricité compromet les opportunités de croissance économique au Burundi et que le manque d’investissements a entravé les efforts d’expansion de l’accès à l’électricité.

« La mauvaise qualité des services d’électricité compromet les opportunités de croissance économique au Burundi et le manque d’investissements a compromis les efforts d’expansion de l’accès à l’électricité », peut-on lire.

La Banque mondiale devrait soutenir le projet visant à augmenter l’accès à l’électricité au Burundi, ce qui contribuera à améliorer la performance du secteur énergétique du pays. Le projet devrait bénéficier à environ 2,4 millions de personnes, 1 200 institutions publiques et 6 000 petites et moyennes entreprises et industries, grâce à un accès nouveau ou amélioré à l’électricité.

Pour la Regideso, le gouvernement a déployé des efforts considérables dans la production d’énergie électrique. Plusieurs projets nationaux et régionaux de production sont en cours de réalisation avec l’appui de partenaires au développement, dont la Banque mondiale et la Banque africaine de développement, visant à augmenter la capacité installée de 78,7 MW en 2020 à 239 MW en 2026, soit une augmentation d’environ 200 %.

Le Burundi mise sur les conférences économiques régionales et la signature d’accords bilatéraux et multilatéraux pour attirer les investisseurs locaux et internationaux, afin de valoriser les atouts du Burundi et améliorer les conditions de vie de sa population.

Prosper Aobe

 

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