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SOCIETE

Cerveau et sexe, quand le biologique se mire dans le social

Une certaine vision des choses voudrait que l’homme soit naturellement supérieur à la femme. Ce que certains fustigent, mettant en avant une construction sociale manipulée.

Aussi importante peut-elle être, la science n’est pas à l’abri des bavures et autres indélicatesses qui la déparent. Parmi elles, l’essentialisme biologique qui brille par une pensée binaire radicale. La nuance n’y a pas droit de cité.

Le livre «  Les hommes viennent de Mars, les femmes de Vénus » en est la preuve éloquente. Il est devenu un best-seller mondial, traduit en 45 langues avec plus de cinquante millions d’exemplaires vendus. Un manifeste du dualisme essentialiste qui prône d’un côté « l’homme rationnel » et « la femme émotionnelle » de l’autre.

Pendant fort longtemps, la supériorité de la gent masculine sur son homologue d’espèce a eu pignon sur rue. Des éminences grises ont défendu bec et ongle cette théorie. Pas si loin qu’en 2005, Lawrence Summers, alors président de la prestigieuse université américaine de Harvard déclarait que « le faible nombre de femmes dans les disciplines scientifiques s’explique par leur incapacité innée à réussir dans ces domaines ».

Bien avant lui, le médecin, anatomiste et anthropologue français Paul Broca n’avait pas hésité a rendre publique une thèse qui voudrait que «tout comme le cerveau des noirs est inférieur à celui des blancs et celui de l’ouvrier à celui du patron, le cerveau de la femme est inférieur au cerveau de l’homme et cela explique pourquoi elle est moins intelligente ».

Qu’en disent les neurosciences ?

Dans cet obscurantisme intellectuel, les neurosciences font figure d’arbitre. C’est d’ailleurs dans cette optique qu’est né en 2012 le Neurogendering network.

Ce collège de neuroscientifiques, sociologues et philosophes s’est donné pour mission de brandir la neuro-éthique contre le neuro-sexisme pour « éveiller la responsabilité des chercheurs sur l’impact  de leurs travaux sur le champ social et politique ».

Dans ce changement de paradigme, un concept a été au centre de plusieurs travaux. Pour prouver l’inexistence intrinsèque de la performance du cerveau de l’homme sur celui de la femme : la plasticité du cerveau. Une révolution en neurobiologie.

Celle-ci, a priori, n’a rien de fataliste. Elle relève beaucoup plus de l’acquis que de l’inné. Catherine Vidal, neurobiologiste et directrice de recherches à l’Institut Pasteur de Paris relève dans Le cerveau a-t-il un sexe ?  que « à la naissance, le nouveau-né a 100 milliards de neurones qui cessent alors de se multiplier. Mais la fabrication du cerveau continue par la connexion entre ces neurones(les synapses) qui sont seulement à 10% à la naissance ».

Là est le tournant. Les 90% qui restent « vont se construire progressivement au gré des influences de la famille, de l’éducation, de la culture et de la société ». Des études de la Khan academy viendront pour prouver que le devenir de nos neurones n’est pas inscrit dans notre programme génétique.

Et la société burundaise dans tout ça ?

« Tu seras viril mon fils, tu seras féminine ma fille », tel peut être le mantra générique de l’éducation à la burundaise. Il ne suffit pas d’être une lumière pour s’en rendre compte. Dans les colonnes du magazine Jimbere, la journaliste Nadine Sahabo brosse subtilement une attitude des jeunes vacanciers d’Ijenda qui en dit long. 

« À la question de savoir pourquoi ils n’étaient pas auprès de leurs parents pour les aider dans les travaux ménagers : « Il n’y a rien à faire. Le ménage, les filles s’en occupent ». Les garçons, eux s’occupent des tâches plus viriles : garder les vaches.

Cette différenciation dans l’éducation qui perdure de nos jours porte en elle des velléités d’un patriarcat partial. En revisitant les proverbes, un des miroirs de la pensée d’une société à tradition orale, on y en trouve toute une batterie de maximes qui relèguent la femme à la sphère domestique, pire, infantilisantes. 

L’on sait tous que « amazi akeshe aheberwa ishuri »[quand l’eau se raréfie, le peu est laissé au taureau] et que « nta nkokokazi ibika hariho isake » [ la poule ne chante pas en la présence du coq], en somme la femme doit suivre religieusement les volontés de son homme.

Dans les institutions politiques, la femme y est moins présente que l’on a du penser à lui coopter un quota de 30%. Dans les filières scientifiques « qui requièrent l’intelligence » comme le veut la doxa dominante, elle n’y est qu’à hauteur de 17% de l’effectif. Autant dire que la guerre contre les préjugés n’est pas encore gagnée.

 

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