Pendant 66 ans, le Burundi a été privé de sa souveraineté lors de la colonisation étrangère. Vingt ans sous la colonisation allemande (1896-1916), et 46 ans sous la tutelle belge (1916-1962). Cette période coloniale n’est pas passée inaperçue dans le lexique rundi, et a laissé des traces.
Pour tout pays, la langue est un facteur d’identité, dépositaire de l’histoire et de la culture de tout un peuple. Au Burundi, le contact du kirundi avec d’autres langues, via la colonisation et l’évangélisation, a fait naître de nouveaux termes rundi utilisés jusqu’aujourd’hui. Le livre « Écho des études Romanes » publié en 2008 par la revue semestrielle de linguistique et littératures romanes, de la faculté des lettres de l’université de Bohême du Sud, dans son volume IV, en témoigne.
« Ikigori » : désigne le « maïs » en kirundi. Ce mot vient de l’anglais « Hickory King Corn », une variété de maïs d’origine mexicaine, introduite au Burundi par les colons Belges. Difficile à prononcer pour les Burundais d’antan, le mot fut imité et prononcé « ikigori » jusqu’aujourd’hui.
« Amahera » : dans le Burundi monarchique, les échanges s’effectuaient à base du troc. Tout change avec l’arrivé des Allemands, qui introduisent en 1904, une pièce monétaire de cuivre appelé « heller ». Les Burundais obligés d’utiliser cette monnaie, imitèrent la prononciation de « heller » en « amahera », et désigne l’argent jusqu’à aujourd’hui.
« Kuvutira » : signifie « aider une vache à mettre bas ». L’histoire remonte avec l’arrivée des Belges qui criaient « Vous tirez » au moment de tirer les pattes du veau quand une vache mettait bas. Ainsi, jusqu’à présent, l’acte a pris le nom de « Kuvutira ».
« Iguturiya » : désigne une longue jupe. Ce mot prend naissance au sud du Burundi, où vivaient des missionnaires pentecôtistes au cours de la colonisation belge. Au moment du nouvel an, quelques femmes des pasteurs faisaient des petits sauts aux Burundi, habillées en longues jupes. En arrivant, elles souhaitaient à leurs maris « Good Year ». Depuis lors, en imitation de « good year » en « iguturiya », ces longues jupes portent ce nom jusqu’à aujourd’hui.
« Uburengeti » : désigne une couverture en kirundi. Toujours avec ces missionnaires protestants du Sud du pays, avec le climat froid du Mugamba, ils demandaient toujours quoi se couvrir en dormant, en montrant du doigt une couverture, et criaient aux vassaux « bring it ». Et eux, ils ont compris « uburengeti ».
« Ishure » : désigne l’école en kirundi. Introduite par les Allemands en 1887, le mot allemand « Schule », fut imité en kirundi par « ishure », et demeure comme cela jusqu’à aujourd’hui.
« Intofanyi » : Ce sont les pommes de terre. Introduite par les Allemands et prononcé « Kartoffel » en allemand, le mot fut imité par les Burundais d’antan en « intofanyi ».
« Imisa » : c’est la messe en kirundi. Le mot tire son origine avec l’arrivée des missionnaires catholiques. La messe était célébrée en latin. La fameuse formule finale pour clore « ite missa est » fut kirundisé en « imisa iraheze », et la célébration eucharistique pris le nom d’ »Imisa », jusqu’aujourd’hui.
« Padiri » : signifie « prêtre » en Kirundi. Le mot vient du titre « padre » que portaient tous les missionnaires catholiques à l’époque. Pour le prononcer, les Burundais l’imitèrent en « padiri », et cela, jusqu’aujourd’hui. Mais d’autres sources confirment que ce nom « padiri » aurait pris naissance quand les prêtres qui donnaient du riz pour attirer les fidèles, ont cessé de le distribuer en criant « pas du riz ».
« Nabutokomba » : le mot signifie quelqu’un d’inapte ou faible dans la société. Pour chasser les Allemands, les Belges avaient des soldats africains dans leur rang, et qualifiaient celui qui est faible d’ « inapte au combat ». Les Burundais l’ont imité à la lettre et le transforment en « nabutokomba », pour dénigrer quelqu’un de faible dans la société.
Vous connaissez d’autres mots hérités de la colonisation ? À vous le clavier.