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POLITIQUE

Élections au Burundi : l’inconvénient de l’avantage

Le rendez-vous électoral de 2020 approche à grands pas. Des visiteurs « inattendus » de dernière heure arrivent. Une avalanche de candidatures nous tombe dessus, et d’autres sont en suspens. Mais avant d’aller voter, réfléchissons à la valeur intrinsèque des élections « à la burundaise ».

Aujourd’hui, trois tendances se dessinent. Primo, le parti aux affaires et la CENI ne cessent de rappeler que les élections seront plus que meilleures. Des mots qui font réagir. Secundo, l’élite non-gouvernementale convaincue que les Bagumyabanga ne sont assez pas bêtes pour financer et organiser des élections afin de les perdre. Tertio et enfin, les sceptiques ou les indécis qui pour eux, les élections sont une équation à plusieurs inconnus. Plus de questions que de réponses. 

De manière classique, l’intérêt des politiques ou formations politiques est de conquérir le pouvoir, l’exercer et le conserver le plus longtemps possible. Aujourd’hui, dans la quasi-totalité des pays, l’élection des gouvernants est considérée comme le seul mode légitime de dévolution du pouvoir. D’aucuns s’accordent sur leurs principes, et les seuls débats qu’elles soulèvent concernent leur organisation. « Est-ce que je vais voter tant que les règles de ce jeu à somme nulle et les comportements électoraux demeurent les mêmes ? », me demande Jean.

Un gros point d’interrogation pour moi

Aucun système électoral n’est parfait et il doit être élaboré en tenant compte du système politique et des réalités du pays. Dans la pratique, le choix d’un système électoral est généralement fondé sur des intérêts liés à la conquête ou à la conservation du pouvoir, ce qui est compliqué surtout dans notre société clivée ethniquement et en conflit politique.

Non seulement le cadre légal régissant les élections au Burundi accuse des incohérences et des imperfections mais aussi comporte des lacunes importantes qui ne lui permettent pas d’atteindre les objectifs assignés aux élections. Tenez. À titre exemplatif, le système utilisé pour les conseillers communaux et les députés est le suffrage universel direct au scrutin de représentation proportionnelle avec listes bloquées. En effet, ce système autorise une « meilleure représentation » de toutes les composantes ethniques dans la mesure où chaque liste doit tenir compte de la diversité ethnique et du genre. 

Néanmoins, ce système accuse des limites à partir du moment où les élus doivent en réalité leur élection aux responsables des partis qui les ont placés en position utile et se sentent beaucoup plus redevables à leurs partis qu’à leurs mandants. « Dans la plupart des cas et je ne suis pas le seul, j’ignore les noms des personnes que j’ai pourtant élus car j’ai élu un parti », commente Joseph.

Comment en est-on arrivé là ?

Le système politique burundais est marqué par un non-renouvellement des élites renforcé par le nomadisme politique. Ainsi, on a à faire à une situation d’élites concurrentes venant de plusieurs partis politiques mais ayant en commun une même culture politique.

Cette unanimité entre tous les partis cache mal d’autres enjeux. Pourquoi il n’y a pas de désaccord sur cet accord ? Pourquoi il n’y a pas d’élections primaires dignes de ce nom ? Cela procède en bonne partie d’une logique de conservation du pouvoir des responsables des partis qui organisent la hiérarchie de façon discrétionnaire au détriment des critères de mérite et de compétence. Et cela, depuis les petites formations jusqu’aux grandes.

À quand l’électeur-consommateur ?

Élire signifie choisir en fonction de ses préférences mais aussi évaluer. Du moins, à mon avis. Tel un consommateur au marché qui achète selon ses priorités, ses goûts et ses préférences. Or, il a été prouvé que dans les pays aux performances économiques limitées y compris le Burundi, les couches vulnérables sont plus enclins à adhérer aux projets sentimentaux et émotionnels alimentés par la peur. Certains politiques n’y vont pas par quatre chemins. Ils appuient sur la corde ethnique, le régionalisme,… d’autres procèdent par l’achat des consciences. Il suffit d’être aveugle pour ne pas s’en rendre compte pendant les propagandes.

Dès lors que l’arène politique est dominée par ces logiques et ces comportements électoraux, les élections seront régulières mais on restera dans des changements quantitatifs et non qualitatifs. Il ne faut pas se leurrer que cela va changer par des discours mirifiques et séminaires car la démocratie on ne la chante pas, on la vit.  La meilleure façon qui peut changer la donne est la revue à la hausse du niveau de vie des Burundais, intellectuel et financier. Ce faisant, ils seront exigeants et sécularisés et par la même occasion, les politiques s’adapteront à leurs comportements et non le contraire.

 

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