L’analyste et blogueur Jean-Marie Ntahimpera n’y va pas par quatre chemins : les candidats indépendants seraient plus dignes de confiance parce qu’ils ne pratiquent pas la « politique du ventre » qui caractérise la grande partie des politiciens de carrière. Mais ont-ils au moins une chance ?
Il y a quelques mois, Francis Rohero, fondateur du mouvement Orange, a créé la surprise en déclarant qu’il se présentera à l’élection présidentielle de 2020 en tant que candidat indépendant. La semaine dernière, c’était au tour de Dieudonné Nahimana, pasteur et patron de l’ONG New Generation, de déclarer sa candidature.
La question que beaucoup se posent est : un candidat indépendant a-t-il une chance d’être élu, dans un pays où certains partis politiques semblent être tout-puissants ? Je répondrais qu’on ne peut jamais le savoir si on n’essaye pas. Si ces candidats indépendants ont décidé de braver tous les obstacles pour se présenter, c’est qu’ils y croient.
Sur les réseaux sociaux, la plupart des réactions à ces candidatures indépendantes sont négatives. On se moque de ces candidats, on dit qu’ils n’ont aucune chance, et que ce ne sont que des carriéristes ambitieux qui ne veulent que mettre « ancien candidat à la présidentielle » sur leurs CV. Mais ce serait une insulte de les réduire à cela. Il y a des meilleurs moyens d’enrichir un CV.
Une autre vision pour le Burundi
En écoutant ces candidats, on sent qu’ils ont en commun une autre vision pour le Burundi. Premièrement, ils croient que si les hommes de bonne volonté se mettent ensemble, ils peuvent tirer le Burundi du club mal famé des pays les plus pauvres du monde et en faire un pays prospère. Cette audace de « rêver grand » est absente chez beaucoup de politiciens traditionnels, qui semblent se contenter d’être « réalistes » et de « manger » comme tout le monde.
Secundo, l’un comme l’autre s’inspirent tous de Martin Luther King qui prônait la non-violence active. Ceci est très important dans un pays où la Commission Vérité et Réconciliation a récemment découvert plus de 4000 fosses communes, où sont enterrées plus de 142 500 personnes, ce qui n’est qu’une infime portion des victimes des différentes crises qui ont endeuillé le Burundi. Nous avons besoin de leaders politiques qui croient qu’un autre Burundi est possible, et qui ne se presseront pas d’appuyer sur la gâchette chaque fois qu’un opposant les contrariera.
Des candidats dignes de confiance
La troisième chose importante à souligner, c’est que ces candidats indépendants n’ont pas fait de la politique leur métier. Ceci est important parce que les gens qui veulent avoir un poste politique à tout prix sont ceux-là même qui finissent par oublier pourquoi ils sont entrés en politique et réduisent leur combat à la « politique du ventre ».
De ce point de vue, les candidats indépendants sont plus dignes de confiance, plus vertueux et incorruptibles que ceux qui ont fait de la politique leur métier. Le Burundi a besoin que ces candidats aient la place qu’ils méritent sur la scène politique et nous ne pouvons que saluer leur courage qui montre que dans notre pays, il est toujours possible de rêver.
Mais pour que ces candidats indépendants puissent se faire une place au soleil, il leur faudra vaincre leur ego, faire front commun et rassembler les gens de différents partis, de différentes régions et conditions sociales, autour de leur projet. C’est sur leur capacité de rassembler que se jouera leur destin.