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Mpimba : ce que vous ignorez sur la plus célèbre prison du Burundi

Les maisons carcérales n’ont pas toujours existé au Burundi. Pays communautariste, une jurisprudence sui generis était chaque fois pensée et mise à exécution. La prison sera donc une institution de l’État moderne et un outil pour l’exécution des décisions de justice. Éclairage. 

Dans la tradition burundaise, la prison n’existait pas. Le roi avait le droit de vie et de mort sur ses sujets. Dans les cas extrêmes, l’excommunication, l’exil ou la décapitation s’en suivaient. L’enfermement tenait place de prison. La première prison de Bujumbura daterait à l’an 1902 et était située en face de l’actuel hôtel Rocca Golf, selon les enquêtes de Christine Deslaurier. 

Mpimba est une rivière qui longe la zone Musaga à la 3ème avenue. Une maison carcérale portant le même nom sera construite en 1959 sous la tutelle belge. L’établissement est aussi appelé « Mw’ibuye » puisque ses murs sont érigés en pierres.   

Effet Ndadaye et Mandela

Buyoya I avait un projet de construire de nouvelles prisons. Prisonnier au lendemain des événements Ntega et Marangara, Melchior Ndadaye estima que l’éducation vaut mieux que les prisons. Il changea symboliquement l’image des prisons burundaises. À Kirundo, une prison en chantier fut transformée en septembre 1993 en Lycée. On l’appellera affectueusement Lycée Ndadaye. Sous son instigation, la couleur des habits des prisonniers passa de noir à vert (couleur de l’espoir). Les effets dégradants infligés aux détenus à l’entrée de la prison : raser leurs têtes ou confisquer leurs chaussures cessèrent aussitôt. Selon C. Deslaurier, Melchior Ndadaye dans ses 103 jours de règne, supprimera les sinistres cachots de la documentation. 

Lors du passage à Mpimba le 8 juin 2001, Nelson Mandela plaida à succès l’introduction des postes de télévision et de radios en prison, cassa les isolements pour les condamnés à mort. Les prisonniers eurent désormais droit aux visites avec un temps plus élargi. En outre, un élan associatif pour la défense des droits des prisonniers vit le jour avec l’APRODH. Une célèbre phrase résumera son constat à Mpimba : « Personne ne peut prétendre connaître vraiment une nation à moins d’avoir vu l’intérieur de ses prisons ». Mandela day est aussi célébré (17 juillet) à Mpimba où, occasionnellement des élargissements s’opèrent.

Séjour à Mpimba

À Mpimba, une organisation interne fait cohabiter l’ordre et le désordre. Les capitas (représentants des prisonniers) ou leurs adjoints (chefs de sécurité, de discipline, de logistique) règnent en maître dans chaque quartier. L’acteur majeur de la vie à Mpimba reste bien entendu la petite corruption, affirme Edouard (pseudo), ancien prisonnier. Tout service est payant ! 

Dotée d’un stade dit « Mahangayiko » (stade de la galère), la prison a aussi un marché, des églises, des champs. Vivre à Mpimba n’est pas toujours et pour tout le monde chaotique. Plusieurs activités s’y déroulent et des métiers s’y apprennent : menuiserie et plomberie, électricité, etc. La commercialisation des stupéfiants et des boissons alcoolisées y est réelle. Son contrôle et son éradication se soldent souvent par un échec. Certains détenus refusent parfois d’être relâchés parce qu’ils y mènent des activités commerciales assez rentables.

Cependant, les conditions de vie y sont déplorables : habitat indécent, nourriture périmée et insuffisante.  

Le sexe pour les détenus est une véritable gymnastique. À l’intérieur de la prison, je vous en épargne. Autour de Mpimba, les maisons de passage ou les hôtels encaissent des fortunes. Triste : pour améliorer leur quotidien, certaines prisonnières n’ont d’autres choix que de se prostituer. Ainsi va leur vie ! 

Surpopulation

Mpimba vient en seconde place (près de 470%) dans la surpopulation carcérale après Muramvya (plus de 600%). Avec une capacité d’accueil de 800, elle a actuellement autour de 4000 prisonniers, rapporte le CICR. Bien plus, les prévenus sont de loin supérieurs aux condamnés, d’ailleurs dans les 11 milieux carcéraux du pays. Le VIH SIDA, le paludisme et la tuberculose rivalisent en mortalité. Les femmes comme les mineurs y sont les plus vulnérables.

Avec une visée de correction et de réinsertion du détenu dans la société, les missions d’une prison ont été détournées. Ces établissements pénitentiaires, budgétivores, sont devenus des lieux de souffrance et de vengeance. Changer le comportement du prisonnier afin qu’il mène une existence conforme à la loi, devienne utile à lui-même et à la société une fois remis en liberté, devrait être le but ultime d’une prison.

 

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