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Samandari : au-delà d’un simple bouffon

Le nom de Samandari revient souvent dans la littérature orale burundaise. Pourtant, peu de recherches ont déjà été faites sur lui. Qui est-il? A-t-il réellement existé? Qu’en est-il de son caractère ambivalent?  

Samandari wa Mandaranga de son nom complet. Cette appellation suppose que Samandari est né de Mandaranga. Littéralement, cela veut dire que Mandaranga est le «géniteur» de Samandari.  

L’abbé Adrien Ntabona, professeur d’université à la retraite et spécialiste de l’anthropologie, estime que Samandari n’a pas existé. Il s’en tient au manque d’objets matérialisant son passage sur terre.

Contrairement à Inarunyonga dont le bosquet appelé «Ku gasaka ka Inarunyonga», planté au chef-lieu de la province Ngozi et entretenu depuis des années, laisse penser à son existence, aucune trace pour  Samandari ni dans le temps ni dans l’espace.

D’après cet universitaire, Samandari serait un personnage dont les Burundais se servent pour faire rire, pour passer une leçon morale : «C’est monsieur tout le monde idéalisé, rendu comique pour moraliser, …».

Samandari, poursuit-il, joue tous les rôles selon celui qui parle. Il est la population qui se projette en personnage de sublimation, d’exaltation. À la cour du roi, Samandari est le bouffon, celui qui amuse la galerie, etc.  

En plus de l’ambivalence de son humour, Samandari est connu comme un personnage d’un sens élevé de justice. Le fameux conte où il parvient, grâce à une histoire de légumes, à montrer au roi les injustices qu’il fait subir à ses sujets est sans précédent.  

Samandari instruit en riant. Il est grossier, cynique, égoïste mais, il a toujours un message à transmettre.  

Quelques histoires autour de Samandari

Les caractères extraordinaires de Samandari apparaissent avant même sa naissance. Il saura parler avant qu’il ne soit né. Il ordonnera à sa mère de lui donner naissance, etc.

Pendant que Samandari était encore dans les entrailles, il insistera quatre fois pour que sa mère lui donne naissance. Pour la première fois, il lui dira : «Agenouille-toi et enfante-moi». La mère refusera et lui demandera d’être un peu patient : «Attends, je ne suis pas encore allée puiser de l’eau».

Quand il fait la même demande pour la deuxième fois, sa mère rétorquera qu’elle n’a pas encore cherché le bois de chauffage. Et quand Samandari insista de nouveau, sa mère lui demandera d’attendre pour qu’elle prépare le repas.

Ainsi, Samandari attendra qu’elle termine toutes les activités ménagères. Au moment où tout était prêt, il lui fera remarquer que tout est bien pour qu’elle lui donne naissance : «maintenant, tu as terminé à préparer le repas, agenouille-toi alors et enfante-moi». À court d’excuses, sa mère s’agenouilla et donna naissance au «petit» Samandari.

Illico, Samandari se mettra à parler, avant qu’on ne lui ait enlevé le liquide amniotique de sa bouche. Il exigera vite de sa mère de la nourriture pour qu’il l’apporte à son père en poste à la cour royale. Samandari n’a jamais été un enfant. Il gardera le même jour les vaches.    

Véritable sphinx, Samandari fait beaucoup rire d’une part. Un jour, il advient qu’il se querelle avec sa femme enceinte et ils en viennent aux mains. Samandari est battu et comme les gens en ont eu vent, ils se moquent de lui, car il avait été battu par une femme.

Et pour se dédouaner, Samandari lâchera : «N’avez-vous pas vu que j’ai eu affaire à deux personnes? Plutôt, j’ai tenu le coup». Comme si l’enfant dans les entrailles de sa femme s’était dressé contre lui aux côtés de cette dernière.   

D’autre part, Samandari brille par le cynisme. Un autre jour, il étrangle une vieille dame très malheureuse. Les gens, n’en revenant pas, lui demandent pourquoi il a osé commettre un tel crime. À la surprise de tout le monde, Samandari s’explique : «Je l’ai trouvée tellement misérable, je pensais que je l’aidais à mettre fin à ses malheurs».   

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