Une centaine d’acteurs de la Grande Île de divers horizons – scientifiques, gouvernement, secteur privé, bailleurs, ONG, société civile –, ont mis au point un document unique en son genre : un guide pratique constitué de 10 principes pour réussir les initiatives de reforestation. Ce document vient d’être approuvé par le ministère de l’Environnement et du développement durable. Les « 10 principes devront désormais être respectés par tous acteurs concernés », a martelé la nouvelle ministre.
De notre correspondante à Antananarivo,
Avec 44% des forêts primaires de l’île qui ont disparu ces 60 dernières années, il y a urgence à replanter à Madagascar. Tout le monde ici en est conscient. Les initiatives de reboisement se sont multipliées ces deux années passées et sont même devenues l’activité phare des journées de « teambuilding », dans le privé comme le public.
Seulement, explique Jean-Philippe Palasi, le co-fondateur d’Indri, le think tank à l’origine de cette grande réflexion des « 10 Principes », « C’est souvent mal fait. Pas par mauvaise volonté, mais parce que soit on va choisir des essences qui ne sont pas adaptées aux sites de reboisement, ou bien planter à la mauvaise saison (les activités ont lieu souvent en fin de saison des pluies alors qu’il faudrait que ce soit en début pour que les plans reçoivent de l’eau, Ndlr), soit parce qu’on n’associe pas les communautés locales et ça, à Madagascar, ce n’est pas possible. Quand les gens vivent dans l’extrême pauvreté, venir sur leur région, leur village et planter des arbres sans les impliquer, c’est voué à l’échec. Et il y a aussi ce qu’on appelle des reboisements « selfie », qui sont plus de la communication qu’autre chose. »
Sur l’île, les bonnes pratiques existent. Mais disséminées au travers d’une multitude de documents différents, souvent compliqués, peu accessibles. Face à ce constat, Indri a rassemblé tous les acteurs du reboisement.
Le reboisement est vital pour Madagascar
« Ce que l’on a fait, c’est vraiment sortir une synthèse avec laquelle tout le monde est d’accord et qui est disponible auprès de tous dans l’espoir que l’ensemble des reboisements à Madagascar deviennent beaucoup plus qualitatifs, poursuit Jean-Philippe Palasi. Le principe le plus fondamental, c’est que le reboisement, c’est un engagement de long terme. C’est-à-dire que ça ne se limite pas au jour où l’on met les plants en terre. Il faut préparer, dans l’identification du terrain, le choix des essences, le travail avec les communautés locales et évidemment le suivi. Ces plans il faut les suivre dans la durée. Le succès d’un reboisement, ça s’évalue sur 5 ans, sur 10 ans, ce n’est pas un instantané. »
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Le guide des « 10 principes de reboisement » rappelle aussi qu’un reboisement s’inscrit systématiquement dans un paysage et pour servir un objectif : restaurer la biodiversité, restaurer de l’eau de qualité dans les rivières, permettre aux gens d’avoir du bois d’œuvre, du bois énergie. « Ces buts sont différents et il faut faire un choix délibéré dès le début de l’initiative pour que le reboisement soit utile et serve le pays », recommande Jean-Philippe Palasi. Chaque principe a été décliné sous forme de cases à cocher pour être un véritable mode d’emploi au service de tous les acteurs de la reforestation.
La reforestation est vitale pour Madagascar. Les études ont prouvé que le reboisement permet de lutter contre la désertification et la sécheresse et de limiter l’intensité des phénomènes extrêmes comme les inondations (en régulant les eaux), bien meurtrières depuis ce début d’année.