En RDC, la question de l’indemnisation des personnes affectées par les projets miniers ou par ceux du secteur de l’énergie continue à se poser. Des paysans se voient expropriés de leur habitation et parfois de leurs moyens de subsistance par des entreprises étrangères sans aucun moyen de recours. C’est le cas de plus de 1 000 personnes délocalisées de trois villages, dans la zone de construction de la centrale hydroélectrique de Busanga, à 100 Km de Kolwezi dans la province du Lualaba. Ce projet chinois est le plus important depuis la libéralisation en 2014 du secteur de l’énergie en RDC.
De notre correspondante à Lubumbashi,
Paulin Kapemba, habitant du village Kamalenge, à quelques mètres de la centrale hydroélectrique de Busanga, a tout perdu. Il y a deux ans, il a été exproprié de sa maison et aujourd’hui, de son champ de maïs.
« En 2018, l’entreprise Sicohydro avait promis de nous délocaliser avant de raser nos villages. Quelques mois après, elle a démoli nos maisons sans contrepartie. Ma maison a été détruite. Et là, mon champ est attaqué par les eaux du lac de retenu de la centrale, se désole-t-il. Finalement, seule l’entreprise a des droits et non pas nous les citoyens ! »
Madame Mujinga est une autre habitante qui a été forcée de quitter son village. Mère de six enfants, elle vient de perdre sa seule source de revenus : « Je vis de la vente des feuilles de manioc de mon champ. Actuellement, le champ est inondé et tous les tubercules de manioc sont pourris. Je ne sais pas comment vivre. »
Près de 1 000 agriculteurs des villages autour du barrage de Busanga sont victimes de ces inondations. Mais jusque-là, l’entreprise chinoise Sicohydro, chargée de la construction de la centrale de 240 mégawatts, n’aurait pas répondu aux revendications des paysans. Ce qui révolte Makanda Ilunga, un autre paysan : « Une délégation du gouvernement provincial et de l’entreprise a procédé aux évaluations des dégâts causés par les eaux du lac de retenu. Jusqu’à présent, il n’y a aucune suite. Donc l’entreprise Sicohydro est venue détruire ma vie. »
Le conflit qui oppose les communautés locales au projet du barrage hydroélectrique de Busanga n’est pas unique en RDC. « Que ce soit pour le barrage de Zongo ou même Ruzizi, les communautés locales n’ont pas été prises en compte au moment de la construction de ces infrastructures, dénonce Jean Claude Mputu, membre du Réseau Mwangaza. C’est donc un problème général pour lequel le Réseau mène un plaidoyer pour qu’une loi sur l’indemnisation des communautés locales soit votée, comme c’est le cas dans le secteur minier. »
Pour ce qui est des populations affectées par le projet hydroélectrique de Busanga, l’entreprise Sicohydro affirme avoir indemnisé – en 2019 – 1 500 personnes pour la destruction de leurs maisons, pour un coût de près de trois millions de dollars. Quant aux paysans dont les terres sont inondées à cause du barrage, elle dit attendre le rapport de la Commission provinciale d’évaluation.