Un enfant non scolarisé sur cinq à travers le monde est nigérian. Dans le pays le plus peuplé d’Afrique, au moins 10,5 millions d’enfants de moins de 14 ans ne vont pas à l’école. Dans les régions du nord du pays, un grand nombre d’entre eux reçoivent uniquement une « éducation coranique », qui n’inclut pas forcément l’apprentissage de la lecture et du calcul. Pour tenter d’y remédier, l’Unicef a développé un programme pour introduire une partie du programme traditionnel dans ces établissements religieux.
Les chants des enfants qui récitent leur leçon résonnent dans les rues de Dambatta. Ces écoliers sont scolarisés dans l’une des très nombreuses écoles primaires islamiques que compte cette grosse bourgade de plus de 200 000 habitants, à 70 kilomètres de la grande ville de Kano.
Dans le nord du Nigeria, les écoles gouvernementales inspirent la méfiance, une crainte héritée de l’époque coloniale et de l’introduction de l’éducation occidentale par les missionnaires chrétiens au Nigeria. « La majorité des matières enseignées ici ont un lien avec l’islam. C’est la différence, car dans les autres établissements scolaires, peu de sujets ont un lien avec la religion », explique Wasilu Adamu, le proviseur de l’école primaire islamique de Lea street.
Son établissement qui compte plus de 590 élèves est l’une des 35 écoles d’enseignement islamiques dans lesquelles une partie du programme classique a été intégré par l’Unicef. Hadi Sabiu Mustapha est l’un des enseignants ayant bénéficié d’une formation. « On a introduit des notions de calcul et d’alphabétisation. Aujourd’hui nos élèves réussissent leurs examens et peuvent même poursuivre leurs études dans d’autres écoles. Ils connaissent bien le Coran et l’anglais aussi ! », fait-il valoir.
La fierté des parents
Au-delà de l’introduction de ces nouvelles matières, les professeurs ont été formés à de nouvelles méthodes pédagogiques, qu’ils peuvent ensuite partager au sein de leur école. Résultat : 72 enfants issus de cette école ont pu poursuivre leur éducation au collège, l’année dernière.
Une fierté, selon Bello Lawan, représentant des parents d’élèves : « J’envoie mes enfants dans une école coranique parce que je veux qu’ils apprennent leur religion. Mais avec le temps, nous avons accepté qu’au-delà de l’enseignement coranique, ils soient aussi exposés à l’éducation occidentale. Cette école nous rend fiers. Non seulement nos enfants apprennent l’anglais, les mathématiques, mais même des bases d’informatique. »
Cet établissement permet de mettre l’accent sur l’éducation des filles, selon Muntaka Mukhtar Mohammed, spécialiste éducation pour l’Unicef à Kano. « L’un de nos objectifs premiers, c’est d’offrir un accès égal à l’éducation basique pour les petites filles, où qu’elles soient. Dans toutes ces écoles coraniques dans lesquelles nous intervenons, la majorité des élèves sont des filles, car les parents préfèrent les envoyer dans ce genre d’établissement. Donc c’est déjà une avancée. »
Le programme mené par l’Unicef en collaboration avec l’état de Kano concerne aujourd’hui 420 écoles coraniques sur les plus de 13 000 implantées dans la région.