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Mahamadou Issoufou: le terrorisme au Sahel, une menace pour le «monde entier»

Le président nigérien Mahamadou Issoufou a accordé un entretien exclusif à RFI et France 24, ce vendredi 5 juillet, à Niamey où se tient le 33e sommet de l'Union africaine. Le chef de l'État nigérien évoque notamment le lancement de la zone de libre échange continentale et le terrorisme au Sahel. Mahamadou Issoufou répond aux questions de Christophe Boisbouvier (RFI) et Marc Perelman (France 24).

France 24 : Monsieur le président, Niamey accueil un sommet extraordinaire de l’union africaine qui va marquer une étape décisive, certains disent historique, à savoir le lancement de la zone libre-échange continentale avec notamment l’annonce que le Nigéria, le géant économique de l’Afrique de l’Ouest, va à son tour signer. Pour vous qui avez beaucoup œuvré, est-ce que c’est vraiment un moment historique ?

Mahamadou Issoufou : Je vous remercie. Pour bien comprendre l’importance de la zone libre-échange continentale, il est important de rappeler que l’Afrique à un agenda, l’agenda du centenaire. L’Afrique en 2063, ça sera le centenaire de la création de l’Organisation de l’unité africaine et cet agenda est bâti autour d’une vision. La vision d’une Afrique intégrée, une Afrique prospère, une Afrique pacifique et une Afrique dirigée par les Africains. Cet agenda est également bâti autour des aspirations des Africains. Aspiration à la paix et à la sécurité, aspiration à la prospérité et aspiration à l’intégration, à la démocratie, à une identité culturelle pour l’Afrique, à l’autonomisation des femmes et des jeunes et enfin l'aspiration d’une Afrique qui a sa place dans le concert des nations. Donc cette vision et ces aspirations ont été traduites dans l’agenda en objectifs et en cibles. Et une des cibles justement, c’est la zone de libre-échange continentale.

La zone de libre-échange continentale fait partie des projets phares du premier plan décennal de l’agenda 2063. Vous savez, nous avons 50 ans, nous avons 5 plans décennaux qui sont prévus pour traduire dans la réalité la vision, les objectifs, les aspirations et les cibles et, comme je l’ai déjà dit, la zone de libre échange continentale c’est une des cibles. Il s’agit d’intégrer le marché africain. Aujourd’hui, nous avons 55 marchés, 55 États, balkanisés, éclatés, nous voulons en faire un marché unique. Ça sera la plus vaste zone de libre-échange continentale du monde, avec, comme vous le savez, un marché d’1,2 milliard d’habitants, aujourd’hui, qui sera un marché de 1,7 milliard, en 2030, et en 2050, nous prévoyons un marché de 2,5 milliards de consommateurs avec des classes moyennes extrêmement importantes. Donc, premier avantage : unifier le marché. Deuxième avantage que nous aurons, c’est que l’Afrique, désormais avec la zone de libre-échange continentale, négociera d’une seule voix en particulier au sein de l’OMC, l’Organisation mondiale du commerce. L’autre avantage, c’est que ce projet n’est pas isolé. C’est un projet qui fait partie d’un ensemble. Par exemple, en ce qui concerne le premier plan décennal, il y a douze projets phares, parmi ces douze projets, il y a des projets relatifs aux infrastructures ferroviaires, routières, énergétiques, comme le barrage de Grand Inga, par exemple. Il y a également les projets relatifs à l’industrialisation de l’Afrique, parce que la zone de libre-échange continentale n’aura de sens que si les Africains ont des choses à échanger. Donc, il va falloir mettre en œuvre une stratégie de transformation des matières premières pour que l’Afrique cesse d’être une sorte de réservoir des matières premières, ainsi de suite. Il y a beaucoup de projets qui vont ensemble avec la zone de libre-échange continentale et la signature de Nigeria qu’on attendait depuis longtemps est une bonne nouvelle. Comme on le sait, le Nigeria est la première économie africaine. En ce qui concerne l’Afrique de l’Ouest, c’est 70% du PIB de la Cédéao, donc une zone de libre-échange sans le Nigeria aurait eu un goût d’inachevé.

RFI : Cette zone de libre-échange, c’est un chantier que vous dirigez personnellement depuis 2 ans, comme vous l’ont demandé vos 54 pairs africains. Vous êtes sur le point d’aboutir. Simplement, Monsieur le président, ce libre-échange, il fait peur à beaucoup d’opérateurs africains parce qu’ils craignent, il faut le dire aussi, la déferlante de produits asiatiques déguisés en produits africains. Le Nigeria, vous en parliez, a perdu toute son industrie textile à cause du libre-échange et de l’OMC il y a 15 ans. Du coup, il va demander à pouvoir continuer à protéger certains secteurs de son industrie. Est-ce qu’à force de dérogations, ce traité ne risque pas d’être une coquille à moitié vide ?

Le traité ne sera pas une coquille à moitié vide. D’abord, vous avez raison de dire que ça fait à peine 2 ans qu’on m’a confié ce dossier. Ce dossier m’a été confié en janvier 2017, sous la présidence du professeur Alpha Condé. C’est lui qui m’a confié ce dossier sur la zone de libre-échange continentale ; et je pense que l’accord de zone de libre-échange continentale est un des accords dont les négociations à l’échelle du continent ont été les plus rapides. On a mis pratiquement 2 ans et 5 mois pour boucler ce dossier et le 7 juillet prochain, nous allons lancer l’entrée en vigueur, avec aujourd’hui 53 signatures, puisque le Nigeria va signer, et 24 ratifications. Alors, la zone de libre-échange continentale ne sera pas une coquille vide. Il y a les risques que vous exposiez, nous sommes conscients de ces risques-là. D’abord, comme je l’ai dit, la zone de libre-échange continentale, c’est un environnement. Il y a d’autres projets phares qui sont liés à ces zones en particulier en ce qui concerne l’énergie. Nous essayons de faire en sorte que les conditions de compétitivité des produits africains soient remplies, que ce soit en ce qui concerne l’énergie, que ce soit en termes de transport, afin de pouvoir être compétitif par rapports aux autres régions, par rapport à l’Asie, par rapport à l’Europe, par rapport à l’Amérique. Donc prem...   

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