Au Liberia, le rapport américain tant attendu sur l’affaire dite « des 16 milliards disparus » a été rendu public.
Depuis le mois d’août 2018, la presse libérienne se fait l’écho d’un scandale hors normes : l’équivalent de 100 millions de dollars américains imprimés en Suède pour remplacer des billets usagés en circulation ne seraient pas arrivés en totalité dans les coffres de la Banque centrale.
L’affaire a déclenché une vague de protestation et même des manifestations dans les rues de Monrovia, la capitale. En réaction, le gouvernement du nouveau président Georges Weah a demandé l’enquête d’un cabinet privé aux Etats-Unis, dont les conclusions sont maintenant connues : aucun container d’argent n’a disparu, mais le rapport pointe de graves dysfonctionnements dans le système financier du pays qui ont pu donner lieu à des détournements de grande ampleur.
Tout d’abord, la Banque centrale aurait outrepassé ses prérogatives. En 2016, elle commande 5 milliards avant d’avoir l’accord du parlement, puis 10 milliards supplémentaires sans son approbation, en violation de la Constitution, selon le rapport.
Dépréciation du dollar libérien
Son objectif était de combler le déficit et de remplacer les billets usagés, trop sales ou déchirés, par des billets neufs. Mais selon le rapport, il n’en est rien : 6 milliards en anciens billets restent en circulation, contrairement aux instructions du Parlement. Conséquence : une poussée de l’inflation et une dépréciation du dollar libérien. Concrètement, pour le citoyen lambda, cela se traduit par une baisse du pouvoir d’achat.
Autres problèmes, les montants dans les coffres de la Banque centrale ne correspondent pas à ce qui est inscrit dans les comptes où les entrées et sorties de billets sont notées à la main, donc aisément falsifiables, la compagnie suédoise a imprimé plus de billets que demandé par la Banque centrale et le poids des palettes transportées par avion ne correspond pas toujours à celui indiqué par l’émetteur.
On ne sait pas comment les « 16 » milliards ont été utilisés
En 2018 le gouvernement Weah rachète aux commerçants leurs dollars libériens contre des dollars américains pour stabiliser sa monnaie, mais là encore les anciens billets sont remis en circulation au lieu d’être retirés. L’opération présente un risque de détournement, de blanchiment ou de trafic, selon le rapport. Il recommande une enquête plus approfondie. Si les « 16 milliards » sont bien arrivés à la Banque centrale, on ne sait pas vraiment comment ils ont finalement été utilisés.
Selon la presse, Charles Sirleaf, fils de l'ancienne présidente Ellen Johnson Sirleaf et gouverneur adjoint de la Banque centrale, aurait été arrêté mercredi 27 février au soir pour son implication présumée dans l'affaire.