Au Maroc, la fête du Trône a cette année un goût particulier. Le monarque marocain célèbre ses 20 ans de règne sur un pays qui n’en a pas encore fini avec les inégalités sociales malgré les efforts de développement économique.
En costume ou en Djellaba, à l’image de sa garde-robe, Mohammed VI n’hésite pas a jongler entre modernité et tradition lorsqu’il est question de politique.
Il est un souverain fidèle à l’image d’un royaume chérifien tiraillé entre continuité et rupture.
C’est à la mort de son père, Hassan II, que le 23ème roi de la dynastie alaouite, a accédé au trône le 23 juillet 1999 à l’âge de 35 ans.
Le jeune monarque avait prononcé le jour de son intronisation, le 30 juillet 1999, son premier discours du Trône. Le » Roi des pauvres » avait marqué les esprits et suscité de grands espoirs en n’hésitant pas à s’adresser aux »couches les plus pauvres » frappées par la pauvreté, le chômage et les inégalités sociales.
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Parmi ses premiers actes de rupture, le limogeage de Driss Basri, le ministre de l’Intérieur de son père, symbole des »années de plomb » (1960-1990). En 2000, l’autorisation du retour d’exil d’Abraham Serfaty, opposant historique. Et en 2004, le lancement de la commission de justice restauratrice avec pour mission, l’enquête sur les violations lors de la période de plomb.
Adopté la même année, le nouveau code de la famille a accordé davantage de droits aux femmes en imposant notamment des conditions à la polygamie et en portant l’âge légal du mariage pour les femmes à 18 ans au lieu de 15 ans avec des dérogations. Une avancée encore loin d’être suffisante selon les associations féministes.
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Une politique de grands chantiers
Sous le règne de celui qu’on surnomme »M6 », de grands chantiers ont été lancés comme le méga-port de Tanger-Méditerranée dans le nord du pays en 2007, premier port d’Afrique en volume. Ainsi que l’immense centrale solaire Noor ou la nouvelle ligne de TGV.
Mohammed VI a impulsé une politique économique avec pour principaux pivots, les grands équipements, l’industrialisation mais aussi la conquête des investisseurs étrangers.
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Dans un contexte régional tendu, le Maroc a aussi l’avantage d’être marqué par une grande stabilité.
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« La stabilité du pays est un indicateur de performance », confirme le politologue Mohamed Tozi.
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Celui qui a aussi le titre de « Commandeur des Croyants » et qui défend un islam tolérant, mène jusqu’à aujourd’hui une politique sécuritaire musclée orientée contre la lutte antiterroriste.
Surtout après les deux attentats qui ont touché le royaume à Casablanca en 2003 (33 morts) et à Marrakech en 2011 (17 morts).
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»Nous n’arrivons pas à trouver des emplois pour nos jeunes, nous avons des régions trop déshéritées »
Malgré le succès économique du Maroc, désormais acteur indispensable de la scène africaine, les fruits de la croissance n’ont pas été redistribués équitablement.
Ce qui peut en partie expliquer la fronde sociale qui a débuté en octobre 2016, après la mort d’un poissonnier qui avait essayé de s’opposer à la saisie de sa marchandise.
Le mouvement de l’Hirak qui avait secoué la région défavorisée du Rif, dans le nord du pays, en 2016-2017, avait conduit à des arrestations et à des peines sévères de prison. Depuis, le roi a gracié quelques 250 manifestants dont une partie lors de son dernier discours du trône, ce lundi.
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Le monarque de 55 ans a d’ailleurs promis à la même occasion, de réduire »les disparités criantes » en annonçant un remaniement gouvernemental pour la rentrée prochaine et la mise en place d’une »commission spéciale » chargée d’un »nouveau modèle de développement. »
Comme un peu partout sur le continent africain, le Maroc a une population plutôt jeune représentant un tiers des habitants et aspirant à une vie meilleure.
Omar Azziman, un des conseillers du roi, est conscient de ce »mécontentement. »
»Nous n’arrivons pas à trouver des emplois pour nos jeunes, nous avons des régions trop déshéritées » reconnaît-il dans un entretien à l’AFP.
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Des pouvoirs exécutifs toujours importants
En 2011, le Maroc n’a pas été épargné par le Printemps arabe, mais la réforme constitutionnelle a rapidement calmé les milliers de Marocains qui sont descendus dans la rue pour réclamer plus de démocratie.
Cette réforme constitutionnelle a renforcé les pouvoirs du Premier ministre mais le roi a toujours entre les mains d’importants pouvoirs exécutifs, notamment les Affaires étrangères, la Défense et la sécurité.
Les secteurs clés de l’économie n’échappent pas également à Mohammed VI.