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Incarcération des enfants : la croix et la bannière ?

Taxés de voleurs, 49 enfants de la rue à Bujumbura et Gitega viennent d’être incarcérés. La chasse de ces enfants semble repartir de plus belle. Mais quid du droit de la présomption d’innocence de ces mineurs en conflit avec la loi ?

Les enfants de la rue, sont-ils tous des voleurs ? Selon l’article 28 du code pénal, les mineurs de moins de quinze ans sont pénalement irresponsables. Or, les 49 enfants sont âgés entre 10 et 13 ans. Pourquoi alors croupissent-ils dans les cachots policiers ? Pourtant, l’article 46 de la constitution du Burundi et l’article 280 du code de procédure pénale, sont clairs. « Nul enfant ne peut être détenu si ce n’est en dernier recours, auquel cas la durée de sa détention sera la plus courte possible »

Le scoop de ces enfants embastillés dont les médias se sont grassement délectés  n’est-il pas l’arbre qui cache la forêt ? Une visite de routine au cachot policière à Gitega laisse voir un nombre incalculable d’autres enfants qui sont détenus, en attendant un éventuel transfert en prison ou au parquet. Cette situation reflète-t-elle une hausse sous-jacente de la délinquance juvénile ? Ou s’agit-il simplement d’une politique répressive plus agressive menant à davantage d’arrestations ?

Quid de la présomption d’innocence ?

Elle est l’une des principales garanties qui assurent une protection efficace des mineurs poursuivis. Elle permet d’éviter toute idée préconçue sur la culpabilité d’un enfant poursuivi pénalement. Au lieu de faire de la détention préventive une exception, certains OPJ et magistrats en font une règle et placent les mineurs en détention si facilement, sans se soucier des séquelles d’une telle situation sur l’avenir et la personnalité de l’enfant. Au lieu de faire de la prison un lieu de correction et d’amendement, celle-ci devient plutôt un lieu d’endurcissement, de création de nouveaux criminels, plus cruels et plus impitoyables. Les centres de rééducation, alternative à la détention préventive et à l’incarcération, sont peu nombreux à l’échelle nationale.

Des avancées oui, mais aussi des défis

« Depuis 2009, la mise en place d’un cadre juridique spécifique pour les mineurs a été un bond de géant dans le combat pour la promotion des droits de l’enfant en conflit avec la loi », se réjouit David Ninganza de la SOJEPAE. Il cite la responsabilité pénale qui est passé de 13 ans à 15 ans, et les alternatives à l’incarcération via la création de trois centres de rééducation pour mineurs en conflit avec la loi.

Mais malheureusement, selon Me Arsène Bampoyubusa, il s’observe une contradiction entre l’existence des textes juridiques protégeant le mineur délinquant et l’insuffisance de leur application effective par les intervenants dans toute la chaîne pénale. De un, alors que l’âge de la responsabilité pénale est de 15 ans, les mineurs de moins de quinze ans qui ont commis une infraction ne peuvent pas voir leur responsabilité pénale engagée, car ils sont pénalement irresponsables et devraient bénéficier d’une présomption irréfragable (irréfutable) d’irresponsabilité.

De deux, la police des mineurs œuvre uniquement à Bujumbura et collabore à l’intérieur du pays avec des points focaux qui ne sont même pas régis par cette police. En plus, la loi portant régime pénitentiaire ne concerne pas les cachots de police qui, au Burundi, sont ceux qui sont souvent remplis d’enfants retenus pour diverses raisons. De trois, le mineur délinquant éprouve beaucoup de difficultés à assurer sa défense s’il ne bénéficie pas d’une assistance juridique. Peu instruits et ne comprenant pas les procédures légales, il ne peut compter que sur les ragots qui circulent à la prison comme seule source d’informations.

L’enfant, et surtout les enfants de la rue, sont des êtres très fragiles qui nécessitent, de la part de l’Etat, une protection particulière en toutes circonstances. Tout ce qui a un impact sur eux ne doit pas leur nuire, ni briser leur avenir. Au lieu de les incarcérer, vu que le mauvais comportement du mineur incombe à toute la société, il convient pour l’intérêt supérieur de l’enfant, de s’occuper de ce qui le pousse à devenir enfant de rue, et privilégier les mesures de resocialisation et de rééducation.

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