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Analyse

« Si la politique de financement agricole n’est pas révisée, nous courrons à la catastrophe »

Au Burundi, malgré une bonne production agricole pour la saison culturale A, la conservation, la transformation et la commercialisation de cette dernière restent une épine dans le pied des agriculteurs. Or, cela pèse non seulement sur ces agriculteurs, mais aussi sur l’économie du pays en général. Et si on révisait notre politique de financement agricole ? Analyse.

Un bon nombre d’agriculteurs échouent toujours à bien conserver leurs récoltes. Ils enregistrent beaucoup de pertes liées aux difficultés de conservation. Mais par-dessus tout, l’insuffisance des infrastructures de transformation vient enfoncer le clou. « À chaque fois que les récoltes sont abondantes, j’ai du mal à écouler mes tomates. De peur que ça pourrisse, parfois, je n’ai pas d’autres choix que de diminuer les prix », témoigne Gilbert.

Ce cas n’est pas isolé. Chez les agriculteurs des tubercules, c’est le même son de cloche. « Je n’avais pas d’autres choix que de vendre la totalité de ma production de pomme de terre à perte. Les pommes de terre ne sont pas conservables pendant une longue période », se désole Marc. Pourtant, dans d’autres pays développés, les pommes de terre sont transformées en chips dont la durée de conservation dépasse dix ans. Mais cela suppose l’existence d’une industrie agro-alimentaire. Malheureusement, ces obstacles découragent les agriculteurs et ralentissent la croissance du secteur agricole qui contribue à une hauteur de 39,6 % au PIB et 95 % de devise.

Par ailleurs avec l’expansion du nouveau coronavirus dans le monde, des questions ne manquent pas. Imaginez par exemple si le Covid-19 venait à envahir notre pays, vu que même les échanges commerciaux avec l’extérieure sont sur le point mort, est-ce que le Burundi pourrait survivre sans infrastructures de conservation et transformation alimentaire ? Probablement non. 

« La grande partie de la production agricole est consommée. C’est rare de la transformer en produits manufacturés conservables longtemps. Une tragédie absolue », relève Kelvin Ndihokubwayo, analyste économique au CDEGL.

Une politique adaptée s’avère urgente

Si le Burundi veut mettre fin à la pauvreté et à la faim, il doit mettre un terme aux importantes pertes agricoles post-récoltes. Mais pour y arriver, le pays doit réviser sa politique de financement agricole qui actuellement repose sur un seul maillon de chaîne de valeur (augmentation de la production). « Je rêve de ce jour où un dirigeant mettra en œuvre la politique de conservation et de transformation des produits agricoles. Au lieu de construire beaucoup plus de stades, il faut penser aux industries de transformation alimentaires. La base du développement. Et là, le problème sera résolu », raconte Mathias de la commune Kayanza.

Il faut trouver un moyen de pousser les agriculteurs à avoir de meilleurs résultats. Il faut qu’ils aient la capacité de produire, de stocker et aussi avoir des débouchés. En effet, le producteur burundais ne devrait plus se contenter de produire pour l’autosubsistance. Il devrait s’engager résolument dans le processus de valorisation des produits et d’accès au marché afin d’en tirer le meilleur profit. Mais pour ce faire, le gouvernement à un rôle important à jouer.

Pistes de solutions

Selon l’expert Salomon Nsabimana dans son étude intitulé Gestion post récolte basée sur la transformation agricole au Burundi, agir efficacement contre ces pertes nécessitera une mobilisation de tous les acteurs impliqués dans la chaîne de valeur agricole. Pour lui, la première piste réside dans la mise à disposition des infrastructures de stockage, de conservation et de transformation. 

En effet, le domaine de la transformation nécessite que les opérateurs économiques investissent dans la mise en place des industries de transformation. Cela revient alors à améliorer notre climat des affaires pour offrir des avantages aux opérateurs économiques engagés dans l’innovation agroalimentaire et la transformation des produits agricoles comme l’a priorisé le Plan Nationale de Développement 2018-2027. Et de cette manière, le Burundi pourra vaincre l’insécurité alimentaire et la pauvreté.

 

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