Qui sera le nouveau locataire de Ntare House ? C’est à cette question que plus de cinq millions de Burundais auront à répondre le 20 mai 2020. À y regarder de près, tout est prêt. Le code électoral bien que lacunaire est là, les fonds ont été levés pour financer cette entreprise politique. Des conditions, estime notre blogueur, nécessaires, mais pas suffisantes.
Des acteurs politiques burundais, on en a de tous les goûts. Des plus sérieux aux humoristes avec de belles histoires, en passant par des populistes chics, beaux sourires, de beaux costumes, etc. Leur dénominateur commun : moins de programmes politiques que du marketing politique. Dans leur ligne de mire, la masse paysanne non instruite, les jeunes, les chômeurs ou ceux exerçant de petits métiers.
Un public pareil admet facilement l’idée qu’on veut lui inculquer. Notre personnel politique, toujours au labo, vient de mettre les points sur les i. Enfin, nous avons une arme made in Burundi pour tuer l’esprit critique. Sans pour autant prétendre à l’exhaustivité, nous nous proposons de donner quelques-unes de ses caractéristiques qui ne trompent pas et comment on veut nous y prendre, nous autres petits électeurs.
Une théâtralisation de tout et dans tout
On peut affirmer sans l’ombre d’un doute que nos princes ont été à l’école du philosophe italien Nicolas Machiavel. Selon le père de la science politique moderne, la politique est appréciée sur le résultat concret. Le prince doit songer uniquement à conserver sa vie et son État. S’il y réussit, tous les moyens qu’il aura pris seront jugés bons. Le journaliste et analyste d’Iwacu Guibert Mbonimpa l’a bien compris. « On assiste ces derniers jours à une nouvelle forme de mercenariat avec comme cheville ouvrière les jeunes citadins les plus en vue ». Chanteurs, comédiens (très actifs actuellement avec un large auditorat), sportifs, etc. À cette longue liste s’ajoutent ceux qui font du business de la charité, les vendeurs d’illusions, « les prophète·sses », « les pasteurs-hommes de Dieu »,… tout ce beau monde a la capacité d’influencer l’état d’esprit de l’autre, voire de manipuler sans pour autant porter une casquette politique pourvu qu’ils y trouvent un compte. C’est du win-win.
Ces ressources psychologiques renforcent l’efficacité d’autres ressources. Mais pour éviter ce que le psychanalyste Serge Tchakotine appelle « le viol des foules par la propagande politique », prenez une distance par rapport à la masse et surtout, à ce que l’on répète parce qu’in fine, vous êtes fondus par contagion. Jusqu’à nouvel ordre, comme le Covid 19, il n’y a pas de vaccin. Se poser la question : « Où est mon intérêt dans tout ça ? », suffira pour tout comprendre.
De vrais faux débats et l’effet moutonnier
S’il n’est pas trop tard, il est plus qu’urgent d’engager un débat sans faux-fuyants sur des questions relatives à l’économie en l’occurrence le secteur primaire, le franc burundais, l’éducation, l’État de droit, la santé pour ne citer que celles-là. Quand bien même débat il y a, à court d’arguments, on les aborde pêle-mêle sans chercher à convaincre avec des imprécisions intentionnelles.
Qui plus est, nos politiques de la mouvance comme ceux de l’opposition sont hantés par la formulation des slogans faciles à mémoriser, donc à reconnaître, le glissement sémantique, et dans chaque moindre phrase de chaque moindre paragraphe, la recherche des boucs émissaires accusés à tort d’être responsables d’un problème réel ou supposé. Ce faisant, tous les débats tournent autour de ça puis relayés par les médias surtout online tels quels, sans décortiquer, parce que préoccupés par le nombre de followers. En touchant sur les sensibilités, les destinataires gobent sans démêler le vrai du faux et s’en approprient.
Une chose est sûre. Tous les propagandistes manipulateurs convergent sur le caractère flou, évasif et mauvaise foi. Comment s’y prendre pour démasquer un manipulateur? Dit autrement, comment manipuler un manipulateur ? Mettez-vous dans la peau de celui-ci. Si vous n’y trouvez aucun intérêt propre, restez flou vous aussi, ne vous positionnez pas, ne donnez jamais votre point de vue car la foule est dangereuse. Développez le self-confidence, le sens critique et surtout quitter le one way.
Enfin, il faut rester sur ses gardes à partir du moment où nous avons de nouveaux visiteurs dans l’arène politique burundaise qui peuvent nous dire ce dont nous avons besoin d’entendre. Ayez à l’esprit ceci : un bon opposant n’est pas toujours un bon dirigeant.
À bon électeur, salut!