Au cours de son histoire récente, le Burundi a accueilli plusieurs casques bleus dans le cadre des missions de maintien de la paix. Au cours de leurs séjours, quelques membres de ces troupes ont eu des aventures avec des Burundaises. Des relations qui ont donné naissance aux enfants dont le sort mérite que l’on s’y attarde.
Anne*, habitant un quartier de la ville de Bujumbura, est encore une jeune fille, à peine seize ans, quand Ingrid*, une voisine la vend aux « prédateurs ». Aujourd’hui, dix-huit ans plus tard, sa blessure est encore béante.
Son fils, un fort joli homme, sait qu’il est issu de la lignée de Chakapar (Inde). Une vérité apprise par le truchement des ragots, sa mère n’ayant jamais eu le courage de lui raconter son histoire.
Un cas parmi plusieurs autres
Anne n’est pas la seule fille-mère du quartier, ni de l’Avenue, victime de ce courant. Les moins jeunes se rappellent bien dans les années 2000 des MIOB, Ethiopiens, Abasawuza (South African) envoyés au Burundi pour le maintien de la paix. Lorsque ces troupes arrivent dans notre pays, elles trouvent une population en manque des besoins de première nécessité à savoir la nourriture, l’eau potable, les abris, les vêtements, etc. Que ce soit dans des camps de déplacés internes, les camps de réfugiés, en ville et dans les villages,il n’y a que des pleurs.
De jeunes femmes et filles commencent alors à offrir leur corps à certains casques bleus contre de l’argent. Les dollars pleuvent. Les vies des jeunes femmes changent subitement. Quand on te disait : « Naka agendana n’Abasawuza » (Telle fille sort avec les Sud-Africains ndlr), tu comprenais très vite qu’elle allait devenir riche dans un futur proche.
À l’autre bout de ces profits matériels, des conséquences néfastes ne tardent pas à s’inviter.
Des pères « prédateurs » et absents
Vingt ans après, les enfants nés de ces unions éphémères sont des adolescents. Peu de leurs mamans ont gardé contact avec les pères de leurs enfants. Les circonstances aussi de certaines naissances prêtent également à confusion dans le cas de femmes avec des partenaires multiples vu qu’elles offraient leurs services à plusieurs individus d’un même contingent. Il était fort délicat d’attribuer la paternité à l’un d’entre eux. Il y a d’autres qui ont reçu de l’argent contre le silence.
Plus malheureuses encore, des jeunes filles ont été abusées pour ni plus ni moins que des biscuits, à la fleur de l’âge. Elles l’ont caché et certaines traînent aujourd’hui le VIH comme une marque indélébile.
Certains membres des missions de maintien de la paix ont été impliqués dans des cas d’exploitation sexuelle de mineurs et des cas de viols, laissant des victimes dans notre pays. Deux questions se posent alors : quel sort pour les enfants issus de ces crimes ? De qui hériteront-ils dans un pays où l’enfant hérite de son père ?
*Pseudonyme