Bugendana est tristement connu dans l’histoire politique du pays. Mais cette commune abrite également un site historique, Mugera, là où est né le roi Mwezi Gisabo, et où est mort Ntare Rugamba.
C’est un pèlerinage entre amis qui me mène à Mugera, une zone de la commune Bugendana. Après une bifurcation à droite avant l’aboutissement de la RN12, à une vingtaine de minutes d’une route montante, en terre battue, taillée à même la montagne, le sanctuaire marial de Mugera, perché sur la colline, domine un paysage magnifique. En contrebas de la colline, le regard se perd entre la vieille cathédrale au style roman, trapue, massive, et les vieux bâtiments du petit séminaire.
De là-haut, on voit la vallée, la Ruvubu et la Ruvyironza, majestueuse, qui serpentent paresseusement au milieu de champs verdoyants. De loin, ces deux rivières se joignent à un endroit « mu mana za Mugera ». « Cette appellation vient des rites de Kiranga qui s’y déroulait autrefois », me raconte un vieillard, trouvé au sanctuaire.
Mugera, la Lourdes burundaise
Connu surtout pour le 15 août, Mugera est le rendez-vous des croyants qui ont une dévotion pour la mère du Christ. Un sanctuaire marial a été inauguré en 1961. L’ancienne cathédrale de Mugera fut la deuxième mission catholique, fondée par les missionnaires en 1899. Outre son lien avec la chrétienté, Mugera est un site historique. C’est là où est né le roi Mwezi Gisabo, et où est mort Ntare Rugamba. « Les arbres royaux « ibigabiro » situés à la colline Mwishunga en sont témoin », explique le même vieillard, avant d’ajouter que même la chaux blanche utilisé lors de l’Umuganuro venait de Mugera.
Mais, l’absence de toilettes à ce sanctuaire qui accueille beaucoup de gens, fait tache d’huile. « C’est un défi à relever pour un bon dirigeant », explique Albert, petit séminariste de Mugera, la première école secondaire du Burundi.
Construit en 1926, ce séminaire a vu défiler une bonne partie de l’élite intellectuelle. Pour Jean, un autre séminariste, « l’établissement a perdu sa place sur le podium des élites, à cause du manque criant de professeurs, un laboratoire mal équipé et une bibliothèque classique ». Corroborant ces propos, un professeur tempête sur la qualité de l’enseignement qui serait en chute libre, et implore un dirigeant qui instaurera un autre système au niveau de l’école fondamentale, pour espérer des résultats palpables en aval.
La commune bouchère
De Mugera au chef-lieu de Bugendana, il aura fallu 20 minutes. « Autrefois, ceux qui accompagnait le roi, Abagendanyi b’Umwami, venaient de cette endroit, d’où l’appellation de la commune Bugendana », nous a expliqué le vieillard de Mugera, avant de souligner que ce rôle se poursuit car c’est la même commune qui a accompagné toutes les étapes de la nouvelle Constitution de notre République.
Situé de part et d’autre de la RN15, le petit bourg de Bugendana est très animé. Des jeunes gens, femmes et hommes, sirotent lentement leur bière tout en goûtant à la bonne brochette de bœuf de Bugendana. Ce jour-là, la viande n’est pas très abondante. Selon André, un boucher du coin, « l’origine de cette diminution réside dans la dévaluation du FBU face au shilling, ce qui limite l’importation des vaches de la Tanzanie comme auparavant ». Pour lui, un bon dirigeant pour 2020 devrait viser l’économie plus que tout autre secteur, en vue de restituer la grandeur de notre monnaie.
À presque 10 mètres de cette route macadamisée, une grande croix noire dans un vaste cimetière attire mon regard. Sur cette croix, on aperçoit une sorte d’épitaphe : « Au matin du 2/7/1996, génocide des 648 Tutsi à Bugendana ». Et à une cinquantaine de mètres, il y a un site des déplacés. « Aujourd’hui, la cohabitation est bonne avec ceux qui sont restés sur les collines, nous partageons souvent et tranquillement un verre », confie Joséphine, avant de remercier l’administration qui se joint à eux lors de la commémoration, contrairement aux années passées. Pour elle, le tort vient des dirigeants qui perturbent leurs bonnes relations par des propos divisionnistes des politiciens surtout lors des élections. « Au lieu de parler des projets clairs, concis et réalisables, ils se servent de la politique de ’’diviser pour régner’’ comme du temps de la colonisation, ce qui est une habitude à bannir pour un bon dirigeant ».
Bugendana est une commune de la province Gitega. Située dans la région naturelle de Kirimiro, elle a une superficie de 283 km², et est limitée au Nord par les communes Mutaho et Gihogazi, au sud par la commune Giheta, à l’Ouest par la commune Rutegama et Mbuye, et à l’Est par la commune Shombo. Avec une population de 121 401 habitants, dont 409 habitants/Km², la commune peut être considérée comme un îlot entouré dans sa majeure partie par des cours d’eau : la Ruvubu qui s’écoule du Nord vers le Sud-Est, la Mubarazi qui constitue sa frontière occidentale, et la Ruvyironza qui forme la frontière méridionale. Bugendana est composée de 22 collines organisées en 4 zones : Bitare, Bugendana, Mugera et Mutoyi. À côté de l’agriculture comme principale source de revenue, les activités à caractère industriel se trouvent concentrées à la coopérative de Mutoyi.