Désormais, excepté la Sogestal Kayanza, les Sogestal Kirimiro, Kirundo-Muyinga, Ngozi et Mumirwa ne peuvent pas acheter le café cerise aux caféiculteurs. Dans sa correspondance du 15 janvier 2020, l’argentier de l’État, Domitien Ndihokubwayo a informé le conseil d’administration de ces quatre Sogestal que le gouvernement du Burundi résilie le contrat de bail.
Dans cette lettre, le ministre des Finances avance deux raisons principales. D’abord, ces quatre Sogestal (Société de gestion des stations de lavage) n’ont pas honoré leurs engagements : le paiement régulier des loyers, l’entretien et la maintenance des biens loués, la rémunération du personnel, le paiement des impôts et taxes et l’organisation efficace et efficiente de la campagne café tel que prévus dans le contrat signé avec le gouvernement. Par ailleurs, ces Sogestal n’ont pas remboursé l’aval de l’État qui leur avait été accordé.
En outre, d’après le caissier de l’État, le plan de redressement de ces Sogestal proposé par un expert porte sur trois ans. Une raison de plus pour convaincre les personnels de ces sociétés. Cette période va au-delà de la période contractuelle qui expire avec la campagne café 2020-2012.
« Un délai de dix jours calendaires, à compter dès la réception de la présente, vous est accordé pour préparer une remise et reprise des biens en bon état », précise le ministre des Finances.
Le personnel refuse de faire la remise et reprise
Le contrat de bail entre les Sogestal et le gouvernement du Burundi a été signé le 18 juin 1993 et s’expire le 28 février 2021.
Cette décision n’est pas bien accueillie par le personnel des sociétés concernées. Cinq jours après la résiliation du contrat de bail, le personnel de la Sogestal Kirimiro a réagi. Dans une lettre adressée à l’administrateur directeur général de ladite société, plus d’une soixante d’employés n’y vont pas par quatre chemins. Ils refusent de faire la remise et reprise. « Nous ne sommes pas prêts à la remise et reprise demandée par le ministre des Finances. »
Ces derniers réclament les arriérés de salaires de 17 mois, le paiement des heures supplémentaires des campagnes 2016-2017 et 2017-2018. En outre, le personnel demande à la Sogestal de payer des intérêts de retard des crédits contractés dans les banques et les microfinances.
Les conséquences de tous ces problèmes sur la production du café et les revenus des caféiculteurs sont inévitables. Visiblement, les travaux préparatoires de la campagne café 2020/2021 ne sont pas pour demain.
Les caféiculteurs confus
Les caféiculteurs sont très pessimistes sur la campagne 2020-2021. Pour Protais, caféiculteur de la Sogestal Ngozi, la campagne s’annonce mal. « Je ne sais pas où je vais vendre ma production.»
Découragé, Protais dit que les grains du café commencent à mûrir. Il espère vendre la première récolte dans 15 jours. Mais il n’a pas de marché d’écoulement.
Même inquiétude chez la Confédération Nationale des Caféiculteurs du Burundi (CNAC Murima w’isangi). « L’Etat résilie le contrat avec les SOGESTAL achetant plus de 70% du café. Où les caféiculteurs vont-ils écouler leur production », s’interroge Macaire Ntirandekura, chargé du plaidoyer.
Les faits sont têtus, poursuit ce représentant des caféiculteurs. Pour le moment, aucune station de lavage n’est prête à acheter le café. Même la Sogestal Kayanza, toujours fonctionnelle, ses stations de lavage n’ont pas encore débuté les travaux pré-campagnes. Et d’alerter : « Nous sommes très en retard. ».
Que faire alors ?
À mon humble avis, la décision de réengagement de l’État pour améliorer le revenu des caféiculteurs commence à perturber la campagne 2020/2021. Les conséquences de ce retard sur la production du café et les revenus des caféiculteurs sont inévitables. Pour le moment, les signaux sont au rouge. Les travaux pré-campagnes n’ont pas encore commencé dans les stations de lavage. Les cultivateurs n’auront, d’ici peu, nulle part où vendre leur récolte. Cela signifie que la production sera abîmée dans les champs. Normalement, plusieurs travaux d’entretien devraient se clôturer avec la troisième semaine du mois de janvier 2019.
Pour moi, la mesure de réengagement de l’État dans ce secteur a été prise à la hâte. D’abord, l’État devrait se réengager vers la fin de la campagne café 2019-2020. Ce qui lui permettrait d’élaborer le plan de redynamisation du secteur et le publier avant la campagne 2020-2021.
En outre, le processus de réengagement n’aurait pas perturbé la campagne 2020-2021. Personne ne sait le contenu de la stratégie de redressement et de redynamisation du secteur café initié par le gouvernement. Ainsi, les propriétaires privés des stations de lavage ne peuvent pas se lancer dans la campagne.
Et leur réticence est fondée. Ils ne savent pas s’ils seront autorisés à vendre le café cerise sur le marché international ou si c’est l’État qui le fera. En outre, aucun entrepreneur rationnel ne peut ouvrir son usine de lavage avant la fixation du prix du café cerise.