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Débat : comment la monarchie burundaise a-t-elle été instituée ? 

Par rapport à l’origine et au contexte dans lequel la monarchie burundaise a été instituée, des informations prouvées scientifiquement ne sont toujours pas au rendez-vous. Le débat qui vient d’être tenu à l’endroit des jeunes  est révélateur. 

Nombreuses sont des versions, certaines plus vraisemblables que d’autres, avancées pour tenter d’expliquer l’origine, l’institution et le contexte dans lequel est  née la monarchie burundaise. Le manque de recherches scientifiques sur le sujet (la plupart de celles ayant été déjà faites, constituent des hypothèses à confirmer ou à infirmer) n’y est certainement pas étranger. 

Selon l’historien Eric Ndayisaba, ce manque d’informations sur cette partie de l’histoire s’expliquerait entre autres par l’absence des sources écrites.La tradition orale longtemps restée dominante au Burundi y est pour quelque chose. Ici, l’étudiant en droit Olivier Clerson Iradukunda pense que des recherches archéologiques pourraient contribuer à donner un peu de lumière sur cette partie de l’histoire.

Et comme à chaque fois que la question (celle de savoir l’origine de la monarchie burundaise) est posée, plusieurs versions ressortent. Le débat de ce jeudi n’a pas fait l’exception.

Pour Apollinaire Ndayisenga, jeune licencié en histoire, il ne faut pas confondre la monarchie du Burundi à Ntare Rushatsi. Avant lui, il y a eu d’autres petits royaumes dirigés par de roitelets. 

Abondant dans le même sens, Providence Niyogusabwa, lauréate de l’Université du Burundi, ajoute que l’existence de dialectes au Burundi expliquerait le caractère disparate du Burundi ancien.

Nuance

Ce manque de recherches sur le sujet, il est là. Réel. Cependant, il est à nuancer. Car, de l’avis du docteur en Histoire, Eric Ndayisaba, certaines recherches sur le sujet ont déjà été réalisées par des Burundais, Emile Mworoha en l’occurrence.

Cet historien invitera le public à lire l’ouvrage Peuples et rois de l’Afrique des Lacs. Le Burundi et les royaumes voisins au XIXe siècle. Mais pour lui, l’on ne peut pas comprendre l’origine de la monarchie burundaise sans prendre en compte la prédominance de la royauté dans la région des grands-lacs à cette époque. Une royauté faite de monarchies centralisées et dont certaines remonteraient au 13èmesiècle alors que celle de Ntare Rushatsi est à situer au 16èmesiècle.

Qui plus est, explique Éric Ndayisaba, il faut distinguer le Burundi « territoire », avec son peuplement antérieur à la fondation du royaume et difficile à situer dans le temps, du Burundi « politique ». Ce dernier commence avec l’installation de Ntare Rushatsi au trône. Une installation qui aurait été l’œuvre des clans parmi les plus influents à l’époque. 

Justement, quel rôle des clans ?

Des petits royaumes qui ont dû être soumis par Ntare Rushatsi, c’est aussi ce qu’avance Alida Iteriteka, chercheure à l’Institut pour la Recherche Scientifique et le Développement, IRSD en sigle, logée à l’Université Espoir d’Afrique.  Avec un petit ajout : ces petits royaumes étaient essentiellement composés de clans. Un point de vue partagé par Fidèle Bavumiragiye pour qui ce sont ces derniers qui ont aidé Ntare Rushatsi à forger son royaume. 

Cette idée sera renforcée par Aloys Batungwanayo, historien et coordinateur de l’IRSD. Citant quelques auteurs, il affirme que ce sont des principaux clans (Abijiji, Abahanza et Abavumu,…) qui  se seraient coalisés pour investir le roi Ntare Rushatsi. Ce sont donc les clans, avance-t-il, qui auraient façonné le Burundi de Ntare Rushatsi, fondateur de la dynastie ganwa. 

Par rapport à cette dernière, Aloys Batungwanayo, citant le prince Charles Baranyanka, expliquera que pour être appelé ganwa, il fallait d’abord être descendant direct du roi (son fils par exemple). Ou tout simplement, quelqu’un pouvait porter le titre d’umuganwa pour avoir administrer une région même sans être descendant du roi. D’où la difficulté selon lui de qualifier les ganwa de clans au même titre que les autres. 

Comme on peut le voir, des versions sur l’origine, l’institution et le contexte de la monarchie burundaise restent multiples. Histoire et légende s’entremêlent. Un besoin d’une recherche digne de ce nom ne peut donc être qu’une nécessité pour relever le défi.  

 

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