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Burundi : « J’ai été violé par ma nounou »

À la suite d’une publication sur la page Facebook de Yaga d’une histoire de viol d’un petit garçon par sa baby-sitter aux Etats-Unis, un lecteur nous a écrit. Il a vécu presque le même calvaire et souhaite témoigner. Voici son histoire.

Je m’appelle Eric*. J’ai 21 ans. Je traîne un lourd secret depuis des années : j’ai été abusé sexuellement à deux reprises par deux filles. La première fois, c’était en 2003, j’étais âgé de cinq ans. J’habitais avec mes parents et mon petit frère qui avait trois ans et demi à l’époque, dans la commune de Kabezi, province de Bujumbura dite rural. Mes deux parents sont tous fonctionnaires de l’État et devaient donc aller travailler la journée. Étant petits, nous ne pouvions pas rester seuls à la maison. Nos parents ont alors décidé de prendre une baby-sitter qui allait nous garder en leur absence. Elle était âgée de plus de 20 ans. Tout allait bien entre nous jusqu’à ce jour où elle m’a fait des choses que je ne comprenais pas.

Habituellement, mon petit frère et moi restions ensemble tout le temps, en compagnie de la nounou. Mais en ce jour de 2003, cette dernière a demandé à mon petit frère d’aller lui ramener quelque chose, chez une amie à elle, qui habitait à côté, avec l’injonction de l’attendre s’il ne la trouvait pas sur place. Aussitôt mon petit frère parti, elle m’a appelé dans sa chambre. Elle a fermé la porte tout de suite et a commencé à me tapoter tout le corps, à me caresser, à jouer avec mon « zizi ». Puis elle a enlevé sa jupe et s’est allongée sur le lit. Elle m’a pris de force avant de me mettre au-dessus d’elle. Elle s’est arrêtée quand mon petit frère est revenu, le temps de lui demander de repartir et de reprendre sa sale besogne.

Nous sommes en 2007. Cette fois-ci j’ai 9 ans et je suis en troisième année d’école primaire. La première femme de ménage étant partie, elle a été remplacée par une autre. Cette dernière a autour de 25 ans. Un jour, alors que nous sommes tous à la maison, les parents au salon, nous nous rencontrons dans le corridor. Elle tente alors de me tirer par force vers sa chambre. Quand je tente de demander pourquoi, elle réplique qu’on allait coucher ensemble, bon gré mal gré. Elle me brutalise alors pour y entrer de force en m’intimant l’ordre de ne pas faire du bruit et attirer l’attention des parents qui ne sont pas loin. Heureusement, ce jour, je parviens à m’échapper et m’enfuir. Elle ne peut pas me suivre car les autres sont là.

Et si j’en avais parlé ?

Comment aurais-je pu raconter cette histoire, alors que je ne savais même pas ce qui m’étais arrivé, mais je garde en mémoire, au moindre détail, tout ce qu’elle m’a fait. C’est seulement autour de neuf ans que j’en ai parlé pour la première fois à des proches un peu plus âgés que moi. Et d’apprendre qu’en fait, j’avais été agressé voire violé. Pour la deuxième fois, c’est par peur que je n’ai rien dit car cette fois-ci, j’avais bien compris qu’il s’agissait d’une tentative de viol. Toutefois, je n’ai pas eu le cran de raconter cela à mes parents, encore moins la première histoire. Mon père étant quelqu’un de très sévère, il m’aurait littéralement « tué », sans même prendre le temps de demander ma responsabilité dedans. D’ailleurs, personne à la maison ne connaît mon histoire jusqu’aujourd’hui.

Dans un premier temps, c’est un sentiment d’impuissance qui l’emporte. Puisque la bonne restait là, je sentais en moi une frustration mélangée à de la peur quand je la rencontrais. Je me demandais si elle n’allait pas retenter le coup. Souvent, pour fuir, j’allais jouer très loin avec les autres enfants du voisinage.

Fort heureusement, tout cela est derrière moi, aujourd’hui. Mais je me demande parfois ce qui serait arrivé si j’en avais parlé. Peut-être que ces filles auraient été punies et de ce fait leur empêcher de récidiver. Si elles l’ont fait pour moi, elles pourraient le faire à un autre enfant. Peut-être aussi que cela aurait pu servir de garde-fou, et d’exemple à tous les coupables de viol, puisque l’on fait comme si les filles qui abusent de garçons ça n’existe pas dans notre société alors que la réalité est toute autre. Cela aurait peut-être permis de libérer la parole.

*nom d’emprunt

 

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