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Burundi : sans devises, rien ne va !

Un mois après la réglementation de change, les effets pervers commencent à se manifester sur les produits importés. Les commerçants lancent un cri d’alarme.

Le Quartier asiatique est connu pour être un centre de négoce où pullulent plusieurs magasins, essentiellement de matériaux de construction. Ce samedi 12 octobre, comme d’habitude, ceux qui montent des chantiers de construction viennent les uns après les autres pour s’approvisionner. Ils font des navettes d’un magasin à l’autre. Parmi eux, Jacques, un jeune homme locataire dans la zone Nyakabiga qui érige sa maison à Carama. Nous le rencontrons mine renfrognée. « Je ne comprends pas ce qui se passe par ici », grogne-t-il, outré.

Jacques était venu s’acheter du ciment, du fer à béton et des tubes pour achever la construction de sa maison. « Dans tous les magasins, je ne trouve pas de ciment », se lamente-t-il. 

Il confie que son fournisseur ne lui promet que quelques sacs de ciment « dangote » à 37 500  fbu le sac. Or, il y a trois semaines, ce sac de 50 kg s’achetait entre 35 000 et 36 000 fbu. D’après lui, la flambée des prix ne se remarque pas que pour le ciment. Le fer à béton et les tubes ne sont pas épargnés.

«On n’y peut plus rien », s’accordent à dire les commerçants rencontrés sur place. Ils sont unanimes : la nouvelle réglementation de la BRB a empiré une situation déjà mauvaise. « La BRB a enfoncé le clou », déplore Sylvestre, l’un des commerçants. Il souligne que les prix du fer à béton et des tubes métalliques ont flambés depuis l’introduction de cette mesure. « Il y a eu de gros changements à l’importation », fait-il savoir, illustrant notamment que le prix du fer à béton en provenance de la Turquie est passé de 12 000 à 20 000 fbu. Le prix du tube importé du Kenya ayant augmenté pour sa part de 6 000 fbu, passant de 30 000 à 36 000 fbu.

Le nœud du problème se trouve être le manque quasi-total des devises. « Les bureaux de change ne servent que ceux qu’ils connaissent. Ils suspectent tout le monde ». Pour s’en procurer, confie Sylvestre, il faut passer par plusieurs commissionnaires. Le pire est prévisible : les stocks commencent à s’épuiser alors qu’ils ne détiennent pas des devises pour importer.

Le chiffre d’affaire en baisse

13 heures, au centre-ville de Bujumbura. L’avenue de la Mission est mouvementée. Mais, les commerçants de vêtements importés sont dans l’angoisse.  « A cette heure-ci, je n’ai encore rien vendu », s’inquiète Wilson. D’après lui, tout a commencé avec la nouvelle réglementation. Avant la fameuse réglementation, témoigne-t-il, j’ai réalisé un chiffre d’affaire de plus 3 000 000 fbu par jour. « Hier, je n’ai encaissé que 200 000 fbu. »

Ce commerçant explique que la plupart des magasins de vêtements importés avaient des clients congolais. « Plus de 90% de mes clients sont des commerçants congolais en provenance d’Uvira. Avec la mesure, ils ne viennent plus s’approvisionner chez moi. »

Ces Congolais viennent s’approvisionner en tapis, habits pour femmes, rideaux, dentelles, etc. Avant cette mesure, les articles étaient moins chers ici. Par exemple, le déplacement en taxi qui coûte 100 dollars à l’Uvira vers Bujumbura revenait à 120 000 fbu dans le sens inverse. Et le dollar s’échangeait entre 2800 et 3000 fbu. Pour le moment, il s’achète 2100 fbu. « Avec les taxes et pots de vin payés pour arriver à Uvira, ces commerçants ont constaté qu’ils ne gagnent pas. Ils ont jeté l’éponge ».

Cet importateur ne sait pas à quel saint se vouer. « Normalement, nous faisons des commandes au début du mois d’octobre pour se préparer aux fêtes de fin d’année. ».

Il indique que l’activité des cambistes est actuellement perturbée. Ils disent qu’ils n’ont pas de devises. Les clients refusent de vendre leurs billets verts au taux de change fixé par la BRB. « Ainsi, nous risquons de fermer nos échoppes sous peu et les prix s’envoleront. » 

En cascade, les commerçants subissent des chocs immédiats. « Nous ne trouvons pas de devises pour importer. Or, les fêtes de Noël et de Nouvel an approchent ». Ces commerçants déplorent la réduction de l’enveloppe destinée à l’importation. «  4 000 dollars par semaine est une somme insignifiante. Même les petits commerçants qui s’approvisionnent en Ouganda utilisent plus de 6 000 dollars »

Ce dernier confie qu’il importe de l’Inde des vêtements de plus de 200 000 dollars par mois. « N’eussent été les bureaux de change, j’allais arrêter d’importer faute de devises », affirme-t-il.

 

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