Sept mois après le coup d’État du général Abdel Fattah al-Burhan au Soudan, la rue continue de se mobiliser, malgré la répression. Des milliers de personnes ont défilé, jeudi 26 mai, dans les rues de plusieurs villes du pays. Certains estiment qu’il est nécessaire de faire des compromis avec la junte pour sortir de l’impasse. Mais dans la rue, cette position est fermement rejetée.
Avec notre correspondant à Khartoum, Eliott Brachet
Lacrymogènes, charges de police, tirs à balles réelles… Chaque semaine, c’est le même scénario qui se répète, sans qu’aucune solution ne se dessine, reconnaît Majda, une étudiante. « Nos demandes n’ont pas changé et malheureusement ça n’avance pas. Toutes les tentatives de dialogues ne pourront pas aboutir, car la rue refuse un pouvoir tenu par les militaires. Tant qu’ils ne se rendent pas pour être jugés comme n’importe quel criminel, il n’y aura pas de solution ».
Tarek vient des quartiers populaires du sud de Khartoum. Il rappelle la position des comités de résistance. « Nous voulons un pouvoir 100% civil. Pas de partenariat, pas de concession. Nous ne nous asseyons pas à une table de l’armée. Nous n’avons plus confiance en elle. Ce sont eux qui ont mis fin à la transition démocratique, affirme Tarek. Et maintenant, ils veulent négocier ? Si un accord est signé avec eux, nous lancerons une escalade révolutionnaire. »
Crainte d’une alliance entre politiques et le régime
De peur que leur mouvement soit instrumentalisé par des partis politiques, certains comme Saad, ne descendent plus manifester. « Ce qui est en train de se passer, c’est que les criminels de guerre, les politiciens dans leurs bureaux et les soutiens de l’ancien régime vont finir par s’entendre en proposant une solution qui sera la négation de la révolution, estime-t-il. Il faut créer une nouvelle manière de faire de la politique dans ce pays. Ça prendra du temps ». En effet, plusieurs partis politiques ont formé de nouvelles alliances et ont présenté des propositions de pourparlers avec leurs rivaux.
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Les comités de résistance ont annoncé un blocage complet de la capitale la semaine prochaine, pour commémorer le massacre du 3 juin 2019 où plus de 130 personnes ont été tuées.
« Si une solution à l’impasse actuelle n’est pas trouvée, les conséquences se feront sentir au-delà des frontières du Soudan », a averti mardi Volker Perthes, le représentant de la mission de l’ONU au Soudan, lors d’une réunion du Conseil de sécurité. Il a exhorté les autorités soudanaises à libérer les détenus restants, mettre fin aux arrestations arbitraires et lever l’état d’urgence.