Près de la ville de Menzel Bourguiba, autour du lac de Bizerte, dans le nord de la Tunisie, un agriculteur s’est lancé, avec l’aide d’une association, dans la plantation de l’un des tous premiers vergers de caroubiers du pays avec de grands espoirs.
De notre correspondant à Tunis,
À droite de la route, une immense étendue azure : le lac de Bizerte ; à gauche, des champs brûlés par le soleil. Edouard Jean est membre de l’association « Les Amis de Capte », qui tente d’agir sur les pratiques agricoles. « Ici, les agriculteurs nomment “médicament” tout ce qui est pesticide, et il y a donc un usage qui est un peu irraisonné. Il faut être conscient des conséquences sur le long terme, que ce soit sur les eaux, pour les sols, ou pour la population aussi », déclare Edouard Jean.
La solution pourrait venir du caroubier, naturellement résistant aux maladies. « Les Amis de Capte » soutiennent le projet de Chiheb Wali : l’agriculteur a planté une parcelle test. « C’est un arbre très rustique, robuste et qui pousse partout. Il n’y a pas de nature de sols spécifique comme pour les oranges ou les amandiers », explique-t-il.
Sur cette colline battue par les vents, il y a un arbre tous les sept mètres et sept mètres entre chaque ligne. C’est peu. Le paysan revendique une agriculture durable, « anti-intensive », précise-t-il. « Une légère pente, un peu de soleil, c’est la Méditerranée en plein été ! Là, on arrive à la parcelle qui fait sept hectares », indique-t-il.
Le caroubier, un arbre vertueux
Le caroubier contribue à la lutte contre l’érosion des sols, il permet aussi d’économiser une ressource naturelle très précieuse en Tunisie. « Il y a une semaine, nous avons irrigué, et on voit déjà les nouvelles feuilles qui sortent. Donc, c’est un arbre qui répond très, très vite à la moindre quantité d’eau, en période de sécheresse », explique Chiheb Wali.
Le caroubier pourrait même aider les producteurs à faire face à l’augmentation des températures, selon Edouard Jean. « En Tunisie, mais comme dans toute la Méditerranée, le changement climatique va obliger les agriculteurs à adapter leurs pratiques. Donc, les cultures gourmandes en eau ou des cultures très sensibles vont devenir très compliquées. »
Les graines du fruit du caroubier pour l’exportation
L’avenir du caroubier tient en une lettre et trois chiffres. L’E.410, épaississant biologique fabriqué à partir des graines de ses fruits. Tombé dans l’oubli au XXe siècle, l’arbre est de plus en plus prisé par les industries cosmétique et pharmaceutique notamment.
« L’E.410 n’est pas encore utilisé ici en Tunisie, donc [les fruits] sont plutôt destinés à l’export. La demande augmente chaque année, donc il y a encore de la place à se faire », assure Chiheb Wali.
Reste à développer la filière, à la structurer. Elle en est à ses tout débuts en Tunisie.