Vendredi 27 août, trois fonctionnaires ont été lynchés par une foule en colère dans le sud-ouest du Burkina Faso. Leur véhicule 4×4 venait de percuter un enfant. Dimanche, le président Roch Marc Christian Kaboré s’est exprimé.
Le président burkinabè, en personne, a réagi ce dimanche 30 août. « Tout en regrettant le décès accidentel d’un enfant dans la localité de Banlo (commune de Bouroum-Bouroum), je condamne énergiquement l’assassinat barbare des agents du Centre de contrôle des véhicules automobiles impliqués dans l’accident de circulation », a déclaré Roch Marc Christian Kaboré. Ce meurtre « d‘une autre époque », a-t-il ajouté,« n’a pas de place dans la République. »
Vendredi 27 août, trois agents du CCVA rentrent d’une mission effectuée à Gaoua et roulent en direction de Ouagadougou, la capitale. Dans le village de Banlo, leur véhicule percute mortellement un enfant âgé d’une dizaine d’années. Quand la police arrive, le corps de l’enfant gît sans vie. « La population en furie », selon les mots du communiqué du procureur, bloque la circulation et le véhicule est endommagé. Toujours selon le procureur, des téléphones portables sont retrouvés dans la voiture, mais aucune trace des occupants.
« En pareille circonstance, en général, l’auteur de l’accident prend la fuite dans le but de se réfugier au poste de commissariat ou de gendarmerie le plus proche. Nous avons donc instruit le commissaire de police de faire tracter le véhicule impliqué dans l’accident en vue de le déposer au commissariat en attendant que le propriétaire se manifeste », poursuit le communiqué du procureur du Faso.
« Finalement, c’est aux environs de 3h du matin que le commissaire de police de Boroum-Boroum nous informait qu’il avait été contacté par le conseiller villageois de développement de Banlo. » Suivant les informations transmises, le commissaire constate la présence des trois corps dans un champ de maïs. Une équipe du parquet de Gaoua, en présence d’officiers de police judiciaire et d’agents de santé, est dépêchée sur place le samedi au petit matin.
Quatre personnes interpellées
Une enquête a été ouverte sur l’accident de la circulation qui a causé le décès de l’enfant et sur la mort des trois agents. Quatre personnes soupçonnées d’avoir participé aux actes de lynchage ont été interpellées. Le procureur du Faso à Gaoua rappelle « qu’en toutes circonstances, le pardon et la tolérance doivent prédominer sur tout autre sentiment de vengeance et de justice privée de nature à remettre en cause les valeurs du vivre ensemble et les principes de cohésion sociale. »
Huit députés du sud-ouest du Burkina cosignent une déclaration parue dimanche. Ils présentent leurs condoléances aux parents « de toutes les victimes de ce drame » et condamnent fermement le lynchage des trois agents. « Nous, les élus nationaux du Sud-Ouest, ne ménagerons aucun effort pour contribuer aux côtés des autorités administratives et des maires de la région, pour un changement fondamental des mentalités. Nul n’a le droit de se rendre justice dans un État de droit. »
« Encore combien de Banlo pour arrêter les lynchages à mort ? », s’interroge le journal burkinabè Wakat Sera dans un éditorial.
C’est grave parce que dans l’Etat de droit, les gens ne doivent pas faire justice eux-mêmes. […] La justice privée ne fait qu’aggraver encore la situation.
Cheikh Alpha Boubacar Compaoré, Procureur du Faso près le Tribunal de Grande Instance de Gaoua.