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Les velléités sécessionnistes trouvent un terreau fertile au Nigeria

Ces derniers mois, le sud du pays le plus peuplé d’Afrique de l’Ouest a vu une résurgence des groupes prônant l’auto-détermination. C’est le cas des groupes Igbo dans le Sud-Est et des Yoruba dans le Sud-Ouest. Olufemi Vaughan, professeur à l’Amherst College aux États-Unis, revient sur ces velléités sécessionnistes, qui ont continué malgré l’arrestation, fin juin, du leader pro-Biafra Nnamdi Kanu, et un raid de la police contre un militant Yoruba, Sunday Igboho.

RFI : Qu’est ce qui explique ces velléités sécessionistes ?

Olufemi Vaughan : Ce qui explique ces velléités sécessionnistes, c’est la perception d’une marginalisation croissante de certains groupes ethniques nationaux, en particulier ceux du sud et du centre du Nigeria. L’enjeu, c’est que nos gouvernements avaient promis de rassembler le pays et ils sont arrivés au pouvoir sur la base de cette promesse. Or, l’administration de Buhari devient de plus en plus un gouvernement du nord, représentant seuls les intérêts des musulmans, des Haoussa et des Fulanis, sans prendre en compte les préoccupations des différentes zones géopolitiques du pays, le sud-est, le sud-ouest, et aussi le centre, la Middle Belt. Et avec l’empiétement des bergers fulanis, qui revendiquent des terres qui ne leur appartiennent pas, dans d’autres régions du pays, le sentiment d’être délaissé augmente. Mais l’administration actuelle ne fait pratiquement rien pour résoudre ce problème. Au contraire, il y a une perception générale qu’elle est complaisante et que, d’une certaine manière, elle encourage cela. Et quand ce sentiment existe, ça crée plus d’insécurité, ce qui se traduit dans des demandes de sécession.

C’est donc l’attitude du gouvernement qui attiserait ces velléités sécessionnistes ? A l’image d’un tweet, qui a depuis été supprimé, du président Muhammadu Buhari, dans lequel il avait promis une riposte ferme contre les « jeunes qui se comportent mal ».

C’est un très bon exemple, d’où on voit qu’il y a une tendance croissante des autorités à privilégier des réponses sécuritaires, parfois extra-judiciares, pour réprimer toute forme de velléité sécessionniste. Dans un pays comme le Nigeria où nous avons une histoire de violence politique contre un groupe ou des groupes ethniques, il incombe au chef de l’État de garder sang-froid et de veiller à ce qu’il dit dans ses déclarations. Plus le gouvernement devient autoritaire, plus ça va provoquer des réactions violentes de l’opposition, et rendre cette dernière plus forte et légitime.

Au-delà de certains groupes, est-ce que ces velléités sécessionnistes sont partagés par le reste de la population ?

Juste parce qu’il y a de groupes bruyants qui appellent à la sécession, cela ne signifie pas pour autant que toute personne qui se trouve dans le même groupe ethnique est prêt à rejoindre le mouvement. Après, je ne dirais pas non plus que ces mouvements sont marginaux. Je pense que c’est quelque chose à prendre très au sérieux. Mais, à mon sens, il n’y a rien qui indique que les Yoruba sont prêts à se séparer du Nigeria, au contraire, les Yoruba sont présents partout dans le pays. Je pense que ce que les Yoruba demandent, tout comme les Biafra, les Igbo et les ethnies du delta du Niger, sont vraiment une plus grande représentation dans la gestion de leur propre gouvernement, plus d’inclusion, elles réclament finalement une restructuration fondamentale du pays dans le sens d’un véritable fédéralisme.

► À lire aussi: Nigeria: sécessionnisme d’hier et d’aujourd’hui au Biafra

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