Le sommet sur le financement des économies africaines se tient à Paris ce mardi 18 mai. En avril 2020, un moratoire a été mis en place par le Club de Paris et le G20, pour plus de 70 pays. Ce dispositif de report du paiement des intérêts, prolongé jusqu’à fin juin 2021, porte sur 5,7 milliards de dollars. Le Sénégal, entre autres, est concerné. A quoi a servi ce moratoire dans le pays ? Faut-il aller plus loin, et annuler la dette ?
Avec notre correspondante à Dakar, Charlotte Idrac
Une « bouffée d’oxygène ». Le moratoire a permis de faire face aux urgences, souligne l’économiste Moubarack Lô, directeur du Bureau de prospective économique, rattaché au Secrétariat général du gouvernement
« Au Sénégal, l’impact c’est à peu près 90 milliards de francs CFA, soit moins de 5% du budget. Donc ce n’est pas le moratoire qui va régler les problèmes budgétaires du Sénégal, mais ça a permis à l’Etat dans une période difficile de mobilisation des ressources de financer son plan de résilience économique et sociale, de soutenir les ménages et les entreprises. »
Dans nos pays, l’Etat ne peut pas continuer à tout supporter. En 2005, le Sénégal a reçu un allègement de la dette, quelques années après, on a atteint un niveau d’endettement de plus en plus important. Donc il faut que les entreprises accompagnent l’Etat.
Babacar Sène, professeur à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar
Une marge de manœuvre, donc. Mais pour Mamadou Mignane Diouf coordonnateur du Forum Social sénégalais, le combat reste l’annulation pure et simple de la dette.
« Compte tenu de la gravité des conséquences du Covid, la seule alternative durable, c’est que la dette soit annulée afin de permettre à nos Etats d’orienter les priorités de dépenses de relance sur les secteurs de la santé, de l’éducation, de l’eau et de l’assainissement…A défaut, nous allons vers des soubresauts post-Covid. »
Dès mars 2020, le président sénégalais Macky Sall avait lancé un appel pour l’annulation de la dette africaine. Une option soutenue par son homologue français Emmanuel Macron, et par le pape François. Mais d’autres voix soulignent que cette solution, déjà expérimentée dans le passé, n’a pas fait ses preuves.
Les solutions aux problèmes de l’Afrique ne sont pas des solutions techniques. On a fait des programmes d’annulation des pays très pauvres endettés, on a vu comment le réendettement est venu une vingtaine d’années après. Il faut qu’on sorte de ces situations de solidarité intéressée pour construire le partenariat sur la base d’avantages coopératifs.
Dr Chérif Salif Sy, économiste sénégalais et coordonnateur du Forum mondial des alternatives