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Sandrine Mubenga, la femme qui contrôle le secteur de l’énergie moderne en RDC

Après avoir frôlé la mort par manque d’électricité, Sandrine Mubenga a décidé de devenir une spécialiste de l’énergie. Depuis l’année dernière, elle dirige l’Autorité de régulation de l’électricité, en République démocratique du Congo. Professeure en génie électrique à l’Université de Toledo dans l’État de l’Ohio, Sandrine Mubenga partage aujourd’hui sa vie entre les États-Unis et son pays natal, le Congo-Kinshasa.

Elle est loin cette période où à 17 ans, Sandrine Mubenga a failli être emportée par une appendicite aiguë à Kikwit – elle s’en souvient comme si c’était hier –, parce qu’il n’y avait pas de carburant pour faire fonctionner le groupe électrogène qui fournissait l’électricité dans la ville principale de la province du Kwilu. Et de cette mésaventure est née une passion et une détermination. Pour elle, « il est inadmissible que des gens meurent à cause » simplement « du manque d’électricité » . La voici partie étudier à Kinshasa l’année suivante et aux États-Unis un an plus tard, à l’université de Toledo, pour se spécialiser en électricité.

Elle mène de brillantes études et entame une carrière prometteuse de chercheuse dans ce pays d’adoption, mais elle a toujours le regard tourné vers le Congo-Kinshasa et son manque d’énergie moderne.

Un rêve de voir la RDC déployer son potentiel électrique

Dans un pays qui produit peu d’électricité (moins de 3 000 Méga Watts sur le réseau national) malgré son potentiel immense, Sandrine Mubenga a été nommée à la tête de l’Autorité de régulation de l’électricité, un organe qui n’existait pas.

« C’est un grand défi, un grand challenge. Dès que j’ai été nommée, il y avait des priorités. Il fallait trouver la logistique, recruter le personnel essentiel qui allait m’aider à mettre sur place certaines actions, mais il fallait aussi trouver des financements de notre structure. »

L’Autorité de régulation de l’électricité, ne peut directement augmenter la faible puissance électrique installée en République démocratique du Congo, mais elle peut le faire de façon indirecte et c’est le défi que doit relever Sandrine Mubenga. Le nouvel organisme qu’elle dirige est chargé notamment de stimuler la compétitivité, précise-t-elle. « L’ARE aide en sécurisant le secteur de l’électricité, parce qu’en ce moment-là, ça permet aux investisseurs d’augmenter leurs investissements. Nous sommes en train de mettre sur place un processus transparent, parce que le problème n°1 des opérateurs, c’est la transparence. »

Une femme qui agit pour réduire le nombre de Congolais sans électricité

Deux ans après avoir créé sa propre entreprise spécialisée dans la fourniture de l’énergie solaire hors réseau, Smin Power Group dont le siège est à Toledo, Sandrine Mubenga a créé au début de la dernière décennie (2011) une branche de cette société au Congo-Kinshasa, où elle fournit de l’électricité à des villages et des écoles (mais pour éviter le conflit d’intérêt, elle a quitté la présidence de Smin Power Group dès sa nomination comme Directrice générale de l’Autorité congolaise de régulation de l’électricité). Ce qui par la suite l’a amenée à se donner une autre mission, après qu’un stagiaire dans son entreprise lui a dit qu’il n’avait pas les moyens financiers pour poursuivre ses études.

« En 2018 on a commencé à offrir 6 bourses aux étudiants dans les STEM, Sciences, Technologies, Ingéniorats et Maths, pour qu’on ait plus de jeunes dans ces domaines. Et avec des amis, on a créé STEM DRC Initiative. En 2019, nous avons donné 53 bourses et cette année nous donnons 100 bourses. »

La science et la technologie au service du développement

C’est le leitmotiv qu’elle met en pratique elle-même. Avec son collègue Thomas Stuart de l’université de Toledo, Sandrine Mubenga a trouvé un procédé permettant d’augmenter la capacité et la longévité des batteries des voitures électriques ou hybrides. L’invention intéresse peu les constructeurs automobiles. Qu’à cela ne tienne, Sandrine Mubenga l’utilise autrement, en récupérant les batteries des voitures – qu’on change tous les cinq ans alors qu’elles ont encore 80% de leur capacité totale -. Ces batteries dites usagées, transformées avec le procédé qu’elle a appelé « bi-level equalizer », sont réutilisées pour alimenter les réseaux électriques.

Ce parcours ne surprend pas Nathalie Tshikudi-Katalayi. Elle et Sandrine Mubenga se sont connues il y a trente ans (en 1991) au collège de Kikwit.

« Elle s’applique toujours très bien dans ce qu’elle fait. Elle va toujours jusqu’au bout. Quand on était à l’école, il n’y avait pas beaucoup de filles qui faisaient l’option scientifique. Les garçons disaient : ce n’est pas pour vous, mais on s’est lancées en se disant : non, on peut y arriver. Et je pense que Sandrine a gardé ce même état d’esprit jusqu’à aujourd’hui. C’est une femme avec un caractère assez fort, assez ferme, mais c’est une femme avec un grand cœur. C’est quelqu’un qui est toujours là pour la famille. Malgré tout ce qu’elle fait, elle trouve le temps pour chacun. »

Une dame aux côtés des jeunes qui font bouger la RD Congo

Ancien élève du collège de Kikwit, mais beaucoup plus jeune qu’elle, Pascal Kanik n’a pas côtoyé Sandrine Mubenga. Créateur en 2016 de Scoolap, une plateforme dédiée au système éducatif en RDC, il n’en revient pas de l’intérêt que la grande dame de l’électricité lui a porté.

« Je ne pouvais pas imaginer qu’elle puisse m’approcher pour m’encourager ! Pour moi, c’est quelqu’un qui nous inspire, qui nous dit que c’est possible en tant que Congolais, on peut aller loin, on peut étudier, on peut changer des choses. J’étais déjà fan, je suivais ses activités. Et aujourd’hui elle nous conseille et nous appuie dans nos initiatives aussi. »

Sandrine Mubenga est aussi très active face à la pandémie de coronavirus. Son ONG, STEM DRC Initiative s’est lancée dans la fabrication de respirateurs. Les prototypes fonctionnel et pilote sont terminés et le processus de développement se poursuit. Sandrine Mubenga a une devise : « Faire de mon mieux dans la poursuite de l’excellence, donc dans tout ce que je fais, faire de mon mieux. » Comme lorsque l’université de Toledo lui confie la gestion énergétique des cinq campus en 2012. Sandrine Mubenga fait économiser à cet établissement 5 millions de dollars en cinq ans.

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