À Madagascar, 7 agents forestiers ont perdu la vie dans l’exercice de leur mission en 2020. Et le nouvel incident d’il y a deux semaines, qui a causé la mort d’un gendarme et de deux habitants dans une aire protégée du centre de l’île, ravive les tensions au sein de ce corps de paramilitaires. Tous se sentent délaissés. Ils réclament la dotation d’une arme de fonction, pour faire face aux trafiquants et pilleurs des forêts, généralement armés.
De notre correspondante à Antananarivo, Sarah Tétaud
Depuis des années, les techniciens des eaux et forêts de Madagascar tentent tant bien que mal de protéger les quelque 3 millions d’hectares de forêts classées du pays. Mais entre le faible effectif des gardes forestiers – moins de 250 pour tout le territoire –, le peu de moyens mis à leur disposition, et l’ampleur des pressions exercées sur les ressources, la tâche relève de la gageure.
« Nous n’avons pas d’armes. C’est devenu très dangereux. Nous avons peur d’aller seuls en forêt », témoigne un garde forestier de l’ouest de l’île, qui a requis l’anonymat. Pourtant, le port d’arme chez les gardes forestiers est une disposition légale inscrite dans la législation forestière.
« Autrefois, il y a 10 ans, nous étions autorisés à porter des armes. Moi, actuellement, j’ai toujours mon arme de l’administration forestière. Mais je n’ai plus de munition depuis bien longtemps. Donc nous revendiquons le droit de porter à nouveau des armes en état de marche parce que notre travail sur le terrain est devenu très compliqué », explique Tovoniaina Rakotonanahary, le directeur de l’environnement et développement durable de la région Analanjirofo.
En 2020, les directeurs régionaux ont tous enregistré une augmentation des infractions sur leurs aires protégées. Population des alentours appauvrie par la pandémie, exploitants miniers, braconniers : les forêts n’ont jamais été aussi agressées.
Alors, « il a bien fallu se débrouiller », poursuit Tovoniaina Rakotonanahary, dont l’équipe est composée de 11 agents seulement. « On n’a pas beaucoup d’hommes sur le terrain. C’est pourquoi nous avons demandé main forte auprès de la police nationale, de la gendarmerie ou des militaires quand nous descendons sur le terrain », rajoute-t-il.
Mais la présence des forces de l’ordre, bien qu’armées, ne suffit visiblement plus à dissuader les trafiquants ou une population dans le besoin. Le 20 janvier dernier, 3 personnes ont perdu la vie suite à une arrestation pour défrichement illégal. Tous en appellent désormais à l’État pour augmenter en urgence les effectifs et les moyens.