Depuis octobre dernier, l’Ordre national des psychologues du pays a lancé – en partenariat avec l’Union européenne, Humanité et Inclusion, SOS Villages d’enfants et Douleurs sans frontières – un numéro vert, le 902, pour apporter gratuitement un soutien psychologique d’urgence aux personnes traumatisées par la pandémie. Depuis mi-décembre et les rumeurs d’un second confinement, le nombre d’appels n’a cessé de croître.
Avec notre correspondante à Antananarivo, Sarah Tétaud
« Allô? Bonjour…
-Oui, bonjour ! Ici une psychologue du réseau Douleurs sans frontières. Que puis-je faire pour vous ? »
Au bout du combiné, un patient guéri du Covid mais traumatisé par un séjour longue durée à l’hôpital. Pour lui répondre, Mihaja Rabenoro, l’une des six psychologues cliniciennes participant au projet.
« On a constaté qu’il y a une recrudescence des troubles mentaux. Surtout des signes d’anxiété, d’angoisse, d’insomnie, de dépression de la part de nos appelants. C’est peut-être dû au confinement mais également aux problèmes économiques que nous Malgaches avons rencontrés durant le pic de la pandémie à Madagascar. Le post-traumatisme est toujours là. »
L’appel dure en général entre 15 minutes et une heure. Les bénéficiaires peuvent se confier aux professionnels de 9h à 18h, du lundi au vendredi. À la base, le service avait été conçu pour les familles des malades. Mais face aux besoins, l’équipe a choisi d’élargir l’écoute aux patients guéris, hospitalisés, et aux familles endeuillées, explique Koloina Andrianilaina, la présidente de l’Ordre national des psychologues.
« Il y a eu les gens qui ont vu leurs proches souffrir, ou mourir et il y a toute la psychose construite autour du fait que c’est une maladie mortelle, donc le fait qu’on soit confiné, puis après qu’on déconfine… Ca a créé beaucoup d’attaques de panique. Quand on a vu qu’il y avait beaucoup de personnes qui avaient besoin d’être écoutées, après ce qu’ils ont vécu durant cette période, qu’ils soient malades ou famille de malades, on a pensé que c’était important de mettre cette ligne pour tout le monde, qu’elle soit gratuite et accessible pour toutes les personnes quelques soient leur catégorie socio-professionnelle. »
La ligne doit rester ouverte au moins jusqu’à septembre prochain. Un tiers des appels ne concerne pas des situations de mal être causé par le Covid et face à des consultations encore trop onéreuses et au manque de cliniciens dans le pays (moins de 30 praticiens sont habilités à exercer sur l’île), beaucoup voient leur salut dans ces consultations téléphoniques gratuites.
Sur la Grande Île, le nombre de cas positifs au Covid a été multiplié par quatre en l’espace d’une semaine, avec un nouveau cluster, localisé à Majunga, sur la côte ouest de l’île. De quoi faire craindre l’arrivée d’une nouvelle épidémie.