Il s’agit d’une affaire qui a suscité l’indignation générale au Soudan : un homme a été tué au cours d’un interrogatoire par les Forces de soutien rapide. Ces unités paramilitaires, intégrées à l’armée soudanaise sous le règne d’Omar el-Béchir et issues des milices Janjawid, ont été maintes fois accusées de crimes de guerre au Darfour.
De notre correspondant à Khartoum, Eliott Brachet
Bahaa el-Din Nouri avait été enlevé le 16 décembre dans un café du sud de Khartoum, la capitale soudanaise, par des hommes en civil à bord d’une voiture sans plaques. Son corps avait été retrouvé cinq jours plus tard. La famille avait refusé de l’enterrer après avoir découvert des traces de coups et de torture. Le 29 décembre, à Khartoum, des centaines de personnes ont défilé dans les rues en hommage à ce nouveau « martyr », exigeant que toute la justice soit faite.
Le cortège funèbre a démarré devant la morgue de l’hôpital, où le corps de Bahaa el-Din Nouri avait été retrouvé une semaine après sa disparition. Des centaines de manifestants se sont réunis autour de la famille du défunt. Sur des banderoles, on pouvait lire entre autres « cessez de verser le sang des gens ». Des slogans qui visaient directement les Forces de soutien rapide.
Pas un cas isolé
Sous la pression d’une affaire qui a pris des proportions immenses, le chef de ces unités paramilitaires et actuel numéro deux du conseil souverain, le général Hemedti, a ordonné la levée de l’immunité des hommes impliqués dans cette affaire. Du côté de l’enquête, la seconde autopsie du corps de Bahaa el-Din Nouri a attesté qu’il avait bien été torturé. Le directeur de la morgue d’Omdurman a d’ailleurs été limogé.
La procession a ensuite traversé Khartoum, en direction du cimetière de Kalakla, le quartier où vivait Bahaa el-Din Nouri. Dans un discours, le frère du défunt a rappelé que ce drame n’était pas un cas isolé. La foule a imploré que justice soit rendue pour « tous les martyrs de la révolution » et notamment pour les victimes de la dispersion du sit-in le 3 juin 2019 devant le QG de l’armée. Le visage de Bahaa el-Din Nouri pourrait bien devenir un symbole contre l’impunité qui règne dans de nombreuses affaires au Soudan.