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Covid-19: les Comoriens de Marseille entre craintes et solidarité face à l’épidémie

Quand et comment déconfiner ? Emmanuel Macron s’adresse aux français ce mardi 24 novembre au soir après plusieurs semaines de fortes restrictions. Une situation qui pèse particulièrement dans les quartiers populaires, pour des raisons économiques mais aussi parce que le taux de mortalité y est plus important qu’ailleurs. Pour faire face, certaines communautés s’organisent. À Marseille, la diaspora comorienne – près de 120 000 personnes – a activé des cellules de soutien.

De notre envoyé spécial à Marseille,

Kamar Eddine Ben Abdallah est d’humeur joyeuse quand il arrive. Chemise impeccable boutonnée jusqu’au cou, et dossier sous le bras

Mais derrière ce masque, il y a un homme d’une bonne trentaine d’années, anéanti. Il est arrivé des Comores il y a trois ans. Sans papier, partageant une chambre avec sa femme et sa petite fille, il traverse cette année d’épidémie sans espoir et sans argent. « C’est effrayant et insupportable, raconte-t-il, les petits services au black que je rendais ont disparu. Je me suis demandé : «  Qu’est-ce que je dois faire pour trouver à manger et payer mon loyer ?  » Je n’ai aucune économie, j’ai vécu des périodes de stress et de peur. Je ne pouvais même plus sortir puisqu’il me faut présenter une pièce d’identité et une attestation. J’ai tout imaginé…un film sans fin »

Se nourrir

Sa première urgence est de se nourrir. Pour cela, il s’appuie sur une des nombreuses cellules de soutien mis en place par la communauté comorienne lors du premier confinement. Il s’agit d’une ligne d’appel directe, accessible 7/7 jours, 24/24 heures ouverte par le militant associatif Nassurdine Haidari et par sa femme, réactivée début novembre. « Il fallait absolument aider cette communauté qui remplissait les lits de réanimation à l’hôpital Nord, explique Nassurdine Haidari, on pressentait qu’il y avait un problème sanitaire dû à la proximité des gens dans des logements vétustes. Ce Covid-19 a sapé d’un coup toute l’organisation communautaire. On a vu une détresse, et une grande solidarité entre les gens ». Face à un État et des structures associatives dépassés, c’est la cellule de base, familiale et amicale qui a permis de sauver certaines situations.

Dans certains quartiers populaires de Marseille, plus de la moitié de la population est au chômage. Kamar Eddine Ben Abdallah, qui vit dans le IIIe arrondissement de la ville, considéré comme un des quartiers les plus pauvres d’Europe, a peu à peu retrouvé quelques remplacements non déclarés : du ménage, de la plonge dans un restaurant avec toujours la peur de rencontrer le virus sur son chemin. « Tout le monde craint cette maladie, que ce soit le gouvernement, les militaires ou les sans-papiers, mais nous sommes les plus vulnérables. Ceux qui ont du travail avec un contrat ont le droit de refuser d’aller travailler et dans ce cas, les patrons se tournent vers nous, les sans-papiers. Ils savent que l’on a soif de travailler. Nous sommes très exposés, on n’a pas le choix, sinon, qu’est-ce que l’on va devenir ? »

Surmortalité dans les départements les plus pauvres

« Les inégalités sociales démultiplient les facteurs de risques », ont récemment démontré des chercheurs dans la revue de l’Institut pour la recherche en santé publique. Sur les deux vagues de l’épidémie, ils ont mis en exergue une surmortalité dans les départements les plus pauvres, la nécessité de travailler et le surpeuplement des logements facilitant la propagation du virus. Les confinements ont d’ailleurs provoqué un électrochoc pour NW, jeune danseur marseillais d’origine comorienne : « J’ai envie d’avoir un endroit plus grand pour demain, offrir une autre vie pour ma famille et moi, raconte-t-il, je voyais certains artistes qui disait, lors du premier confinement : « Restez chez vous« . Mais c’est facile quand vous avez des hectares de jardin. J’espère que ça va nous aider à sortir de ces endroits-là et à avoir une vie meilleure. Je pense qu’il y aura un après. Aujourd’hui, il faut justement préparer cet « après ».

NW transcrit l’optimisme de cette jeunesse. Debout malgré le report ou l’annulation de ses projets. « 2020 est une année à refaire », dit-il. Elle aura finalement servi à réveiller la solidarité et à éteindre un tant soit peu les fatalités.

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