Si la chaîne de transmission à l’origine exacte de la pandémie de Covid-19 n’est pas encore bien établie par les scientifiques, tout indique selon l’OMS que le virus a une origine animale, et que la chauve-souris en était le premier réservoir. Au Zimbabwe, depuis plusieurs années, une équipe de chercheurs, composée de l’IRD, du Cirad et de l’université publique, se penche justement sur les différents types de coronavirus présents chez les chauves-souris, pour essayer de mieux les comprendre.
Le programme est loin d’être nouveau : il a été lancé en 2017. Mais avec la crise sanitaire mondiale du Covid-19, ce projet de recherche au Zimbabwe a connu un nouvel élan. Car connaître plus précisément les coronavirus présents dans les chauves-souris pourrait permettre de mieux réagir en cas de nouvelle épidémie.
« Cela va nous apprendre d’une part à mieux connaître la diversité génétique des coronavirus qui circulent dans ces colonies et de reconstruire des parentés entre ces différents virus. Ça va aussi nous permettre de développer un panel d’outils qui nous permettraient d’être plus réactifs. Plus on étudiera la diversité génétique de ces virus et plus on sera en mesure de réagir rapidement à des événements de transmission inter-espèces et d’infections humaines », explique Florian Liégeois, virologue à l’Institut de recherche pour le développement (IRD).
Les recherches se concentrent au centre et au nord du pays, où des colonies de chauves-souris ont été identifiées et approchées. « L’idée est de faire des prélèvements. Soit des prélèvements non invasifs, c’est-à-dire que l’on met des bâches plastiques et qu’on collecte les fèces et l’urine qui ont été lâchés. Ou alors des prélèvements un peu plus invasifs, où l’on fait des captures. Et on fait des prélèvements soit de sang, soit de la salive ou des fèces, pour pouvoir ensuite les analyser », détaille Mathieu Bourgarel, chercheur au Cirad.
Ces prélèvements sur le terrain sont pour l’instant mis en pause suite aux restrictions sanitaires liées au Covid-19. Mais les scientifiques continuent d’étudier en laboratoire les échantillons déjà collectés. Et si la chauve-souris intéresse tant les virologues, ce n’est pas un hasard. « D’abord la chauve-souris est un animal ancestral et qui a eu la possibilité de co-évoluer avec certains virus, rappelle Florian Liégeois, de l’IRD. Et la particularité de la chauve-souris, c’est que c’est le seul mammifère volant. Elle a un certain nombre de spécificités biologiques qui, pense-t-on, pourrait favoriser le maintien de certains virus dans son corps. »
Le problème n’est pas tant que ces virus soient portés par ces chauves-souris, mais plutôt la relation que l’homme entretient elles, et les possibilités de transmission. Et comme l’explique Elizabeth Gori, de l’Université du Zimbabwe, il existe dans le pays un contact direct entre l’homme et l’animal : « Les déjections de ces chauves-souris sont ensuite utilisées par les fermiers locaux comme engrais naturels. Et cela crée donc de fortes interactions entre les chauve-souris et les humains. »
Des recherches similaires sont aussi menées dans d’autres pays du continent, comme en Guinée ou au Cameroun.