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Témoignages de victimes de viol de Yahya Jammeh

Gambia Copyright de l’image FATOU JALLOW
Image caption Fatou Jallow dit avoir fui la Gambie après avoir été violée et vit maintenant au Canada.

Ces femmes disent avoir été violées et agressées sexuellement par l’ancien président Yahya Jammeh entre 2013 et 2015, selon une enquête de Human Rights Watch et Trial International. L’une de ces femmes qui a accepté pour la première fois de parler publiquement, dit espérer que son témoignage pourrait aider à relancer le débat sur les viols et les agressions sexuelles dans son pays.

La jeune femme de 23 ans qui a accepté de témoigner s’appelle Toufah Jallow. Elle a fui la Gambie il y a 4 ans. De passage à Dakar où elle s’est confiée à la BBC, elle a expliqué qu’elle avait essayé en vain de cacher son histoire, « de faire comme si cela n’était jamais arrivé ».

« En fait je n’y arrivais pas, donc j’ai décidé d’en parler parce qu’il est temps d’en parler pour être sûre que Yayha Jammeh va entendre ce qu’il a fait » a-t-elle expliqué.

Copyright de l’image Getty Images

Image caption Yahya Jammeh a dirigé la Gambie pendant 22 ans

A l’âge de 18 ans, Toufah est vainqueur d’un concours de beauté organisé par le gouvernement . C’est à cette occasion qu’elle a rencontré Yayha Jammeh pour la première fois a-t-elle dit. Elle a raconté que dans les mois qui avaient suivi, le président agissait envers elle comme un père, lui offrant des conseils, de l’argent et des cadeaux jusqu’au jour où, dit-elle, il l’a demandée en mariage. Elle a refusé, a-t-elle poursuivi.

Toufah a affirmé qu’elle avait ensuite été invitée à une cérémonie religieuse à la présidence, mais en arrivant sur les lieux, elle avait été conduite à la résidence privée de Jammeh.

« Ses yeux etaient remplis de vengeance, il était tout rouge et il m’a demandé pour qui je me prenais » a expliqué Toufah Jallow.

« Je lui ai demandé ce qui se passait… il m’a attrapé la main et m’a tirée vers une autre pièce; c’est là que j’ai compris ce qui se passait » a raconté la présumée victime.

« Il a mis ses organes génitaux sur mon visage, il m’a poussée à terre sur mes genoux, il a relevé ma robe et là il m’a sodomisé » a-t-elle expliqué, non sans préciser qu’elle criait de toutes ses forces. La jeune gambienne a ajouté que son bourreau lui avait injecté quelque chose dans son bras et qu’elle se débattait.

« Je pense qu’à travers tout ce temps, ma plus grande honte vient du fait qu’à partir d’un moment j’ai arrêté de me débattre » a-t-elle conclu.

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Quelques jours après, de peur que cet incident se reproduise, Toufah s’est enfuie au Sénégal où elle a recherché l’aide des organisations de défense de droits de l’Homme qui lui ont accordé le statut de personne sous protection et l’ont aidée à s’envoler au Canada où elle vit depuis.

La BBC a tenté en vain de prendre contact avec Yayha Jammeh en exil en Guinée Equatoriale. Elle a en revanche contacté le vice-président de son parti, APRC, et il a déclaré : « Jammeh est un leader respectable, pieux, craignant Dieu, qui n’a que du respect pour nos femmes gambiennes ».

Pour Toufah Jallow, le vice-président du APRC ou la plupart des personnes qui suivaient l’ex-président ne savaient rien de ce que Yahya Jammeh faisait dans sa vie privée. Elle a affirmé qu’elle aimerait qu’il sache qu’elle existe, qu’elle est là et reprends le contrôle de cette histoire, avec sa vérité à elle.

« J’espère qu’il aura le courage d’y répondre, d’y faire face, ou même d’être a nouveau dans une pièce avec moi mais cette fois dans une cour de justice » a-t-elle précisé.

Copyright de l’image AFP

Image caption Yahya Jammeh s’était souvent rendu dans son village natal de Kanila.

Toufah a aussi affirmé qu’elle espérait créer une atmosphère où les femmes se sentiraient plus libres de parler de viols et d’agressions sexuelles.

« C’est quelque chose qui se fait progressivement, dit-elle, notant que « quand la conversation devient plus globale, quand de plus en plus de femmes se joignent a la conversation, elles se sentent plus libres et plus en sécurité pour en parler, plutôt que de rester seules dans leur bulle. »

En Gambie, l’actuel gouvernement a créé une commission pour documenter les violations des droits de l’Homme commises durant les 22 ans au pouvoir de Jammeh. Cette commission a déclaré à la BBC qu’elle était au courant des allégations de violences sexuelles impliquant l’ex-président et que les enquêtes étaient en cours. Elle prévoit de rendre sa copie d’ici la fin de l’année.

Cela pourrait prendre des années avant que Toufah Jallow puisse voir Jammeh devant une cour de justice. L’actuel président Adama Barrow dit attendre le rapport final de la commission avant toute éventuelle demande d’extradition de Yayah Jammeh de la Guinée Equatoriale.

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