Le Centre for Development and Enterprises Great Lakes (CDE Great Lakes) en partenariat avec l’Initiative for African Trade and Prosperity « IATP », souligne que le Burundi a des opportunités avec la zone de libre-échange continentale africaine, mais également des défis à relever pour libéraliser le potentiel de son commerce.
C’est connu, la prospérité d’un pays n’est pas possible sans son ouverture au monde extérieur. Tous les pays qui ont atteint une croissance économique, y sont parvenus en saisissant les opportunités offertes par la libéralisation des marchés régionaux et internationaux. Vu la place du Burundi dans les classements de l’indice de liberté économique ou de l’ouverture commerciale, il n’est pas encore un bon élève en matière d’ouverture commerciale malgré l’intégration à de nombreuses communautés économiques.
Une de ces opportunités que le Burundi devrait saisir, c’est la ZLECAF. « Ce sera 90 % des marchandises qui seront exemptées de droits de douane, ce qui devrait stimuler les échanges intracontinentaux, inciter les investissements directs étrangers, et de ce fait, élever la croissance et réduire la pauvreté au Burundi », confie le directeur de recherche du CDE Great Lakes, Dr Franck Arnaud Ndorukwigira.
Selon la Banque mondiale, d’ici 2035, la ZLECAF permettra d’augmenter le PIB de l’Afrique de 450 milliards USD, d’augmenter les salaires des travailleurs qualifiés et non qualifiés de 10 % et de sortir plus de 30 millions de personnes de l’extrême pauvreté (vivre de moins de 1,90 dollar par jour), et plus de 68 millions de personnes de sortir de la pauvreté modérée (vivre de 1,90 à 5,50 dollars par jour).
Une opportunité pour le Burundi ?
Le Burundi a signé l’Accord de la ZLECAF le 02 juillet 2018, à Nouakchott en Mauritanie. Dans ce processus d’ouverture commerciale au niveau continental, l’économiste Salomon Nsabimana souligne que le Burundi a des avancées considérables. Le pays a ratifié l’accord de la ZLECAF le 17 juin 2021, et une stratégie nationale autonome de mise en œuvre de la ZLECAF a été élaborée et validée, indique-t-il.
Pour le professeur Nsabimana, la mise en œuvre de la ZLECAF permettra de créer pour le Burundi un marché extérieur croissant pour les biens exportables et services, sans barrières tarifaires et non tarifaires mais aussi la liberté de circulation des investisseurs. Par-là, il y aura une baisse des prix des produits finis au profit des consommateurs burundais, le développement des chaînes de valeurs régionales, un accès des producteurs aux matières premières moins chères, une concurrence étrangère qui incitera une mise à niveau des entreprises burundaises pour faire face à la concurrence et, un élargissement du marché d’emploi.
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Des défis à relever ?
Certes, l’enjeu est de taille. Selon le professeur Salomon Nsabimana, il s’observe une faible appropriation des différents textes de la politique commerciale par les opérateurs économiques, entravant ainsi la mise en œuvre de la ZLECAF. « La ZLECAF n’est pas un simple accord, mais un instrument stratégique pour le développement et l’intégration de l’Afrique, et du Burundi en particulier », ajoute professeur Salomon.
En plus, le pays note une insuffisance et faible qualité de l’offre exportable à cause d’un accès limité à l’énergie, une absence des industries et usines de transformation, une insuffisance des infrastructures de transport et de la logistique de stockage et de conservation des produits exportables, un manque d’un mécanisme spécifique de financement des exportations et, une faiblesse du cadre réglementaire encadrant le commerce.
C’est sans oublier l’absence d’un dispositif efficace de production des informations stratégiques utiles pour les opérateurs économiques, il faut noter une méconnaissance des avantages et opportunités à tirer des accords conclus. Il y a aussi un faible professionnalisme en matière de commerce exacerbé par la tendance de travail en solo et un faible pouvoir d’achat. Également une absence de balance commerciale déficitaire, et un faible niveau de qualification de la main d’œuvre disponible, sont notoires.
Piste de solutions
D’après Aimable Manirakiza, directeur du CDE, le ZLECAF est une solution à la création de l’emploi et des opportunités pour tous au Burundi. Pour y arriver, les investisseurs burundais doivent s’assurer que leur production implique une transformation ou une valeur ajoutée suffisante. Cela implique pour le Burundi de dynamiser sa production, multiplier l’infrastructure industrielle et énergétique pour accroître ses exportations. Le pays doit créer un environnement favorable aux investissements nationaux et étrangers à travers les petites et moyennes entreprises. « C’est de cette manière que le Burundi pourrait développer sa compétitivité et s’imposer comme un concurrent sérieux sur le marché africain, afin de profiter des bienfaits de la ZLECAF », ajoute Aimable Manirakiza du CDE.
Au-delà de ces défis, des efforts de diffusion et vulgarisation à grande échelle des contenus de la ZLECAF sont plus qu’une nécessité. Il faut que toutes les parties prenantes soient informées des attentes de la ZLECAF, et qu’elles en fassent une appropriation effective. Cette appropriation nationale de la ZLECAF sera d’une importance capitale pour impulser les efforts d’amélioration des performances commerciales au Burundi. Le Burundi doit tirer pleinement bénéfice d’une ouverture commerciale à l’échelle continentale, ce qui boosterait la prospérité et la croissance économique pour le pays.