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La monoculture, une bonne politique pour booster la production agricole ?

Au Burundi, depuis 2007 est mis en place un programme d’intensification agricole visant à prioriser le maïs hybride, le riz et les pommes de terre dans presque toutes les provinces du pays. Est-ce une bonne politique pour notre pays ? Est-ce que le Burundi prend le bon chemin ? Analyse

Deux questions pour commencer. Combien de variétés de cultures traditionnelles connaissez-vous ? Maintenant, combien de ces variétés pouvez-vous encore retrouver actuellement ? C’est une évidence, l’agriculture au Burundi a changé depuis l’époque de nos grands-parents. À leur époque, l’association des cultures était très importante. Pour preuve, entre 1968-1969, la banane couvrait 13,5 % de terres arables, la patate douce, une plante des marais mais aussi des collines, couvrait 3,4 %. Le manioc qui poussait partout couvrait 7,4 %, la colocase (variété en voie de disparition actuellement) qui était une plante secondaire occupait 2,02 %. Quant au haricot, une plante reine au Burundi, il couvre 26,7 % des terres arables. Cela sans oublier le maïs, les différentes variétés de sorgho, l’éleusine, le petit pois, l’igname, inumpu, amafyiru, etc. 

Tout cela permettait de diminuer le risque et les conséquences d’une mauvaise récolte et par ricochet, de garantir la sécurité alimentaire des familles. La situation devient compliquée si le paysan mise tout sur une seule culture, ce qu’on appelle la monoculture.

La monoculture, seule solution face à l’insécurité alimentaire ?

De nos jours, la monoculture gagne de plus en plus du terrain. Il n’est plus rare aujourd’hui de traverser des kilomètres à l’intérieur du pays et voir des vastes étendus de maïs hybride, de riz dans les marais et de la pomme de terre sur les collines. 

Pour certains acteurs de développement (avec lesquelles nous avons discuté sur ce sujet), cette orientation vers la monoculture est la seule réponse face à l’insécurité alimentaire pour un pays dont la population ne cesse d’augmenter. Mais, une question importante: est-ce vraiment la bonne solution ?

Coup de projecteur

Certaines études montrent que la monoculture est de moins en moins rentable. Pour bien illustrer ce propos, partons d’un exemple. Quand de grands espaces sont consacrés à une seule culture, c’est toute la récolte qui est hypothéquée. Qu’une nouvelle sorte d’insecte ou de maladie surgisse, toute la plantation risque d’être endommagée. Cela n’est généralement pas le cas si l’on plante plusieurs variétés de culture. Ici, les dégâts causés par les chenilles légionnaires et les insectes ravageurs qui s’attaquent principalement au maïs sont une preuve suffisante, à nos yeux, de ce qui vient d’être annoncé. Cet exemple illustre la situation qui prévaut généralement dans beaucoup de provinces du pays. Et si les cultures de réserves n’avaient pas été remplacées par le maïs sur de grandes étendues, la situation sera-t-elle aussi préoccupante ?

Les pesticides, l’autre préoccupation

Les agriculteurs appliquent de plus grandes quantités de pesticides pour protéger ces cultures. Or, ces produits chimiques s’infiltrent dans le sol, contaminant à la fois le sol et ses eaux souterraines. Ce qui engendre l’épuisement de certains éléments nutritifs des plantes et la baisse de la production agricole, sans oublier les maladies que ces produits absorbés par les plantes peuvent causer chez l’homme. 

Une certaine opinion dit que l’on devrait penser à protéger l’élément essentiel de l’agriculture, à savoir la terre. D’après le Plan National de Développement PND 2018-2027, l’agriculture contribue à hauteur de 39,6 % au PIB du Burundi. Elle apporte 95% de devises au pays et offre 84% d’emplois. Bien plus, elle constitue 95% de l’offre alimentaire au niveau locale sans oublier qu’elle est le principal pourvoyeur de matières premières à l’agro-industrie.

L’association des cultures n’est pas à jeter 

L’évidence est qu’avec cette tendance à la monoculture le pays court un grand risque. À notre humble avis, il faut cesser de copier des modèles occidentaux, car nous sommes dans des contextes différents. En Afrique, les sols se dégradent vite, contrairement aux sols d’Europe où le climat est tempéré.

Tout compte fait, pour une population à 90 % agricole et dans un contexte d’exiguïté des terres arables, la solution à la grande question de l’insécurité alimentaire passe par la diversification des productions agricoles à travers la pratique raisonnable des cultures associées. Celles-ci limitent des adventices et dans certains cas, des maladies et insectes qui se propagent plus aisément en culture pure.

L’agriculture burundaise a besoin alors d’être accompagnée. Les questions subsistent certes concernant une optimisation des associations de cultures. Autant de voies de recherche que le pays devrait aborder dans le futur.

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