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Négociant d’avocats ou ingénieur ? Mon cœur balance !

La vidéo du président de la république vantant les mérites d’un camionneur qui fait le négoce des avocats burundais à Dar-es-Salam fait un tabac sur les réseaux sociaux. Le parallélisme avec un ingénieur dans la dèche a suffi chez certains pour pisser sur l’école. Quo vadis ?

Entrepreneur, c’est le mot à la mode. Ne pas se voir entrepreneur dans ses projets est synonyme de signer son arrêt de mort sociale. C’est du moins le narratif vendu aux jeunes. Quoi de mieux que les partageurs compulsifs de nos réseaux sociaux pour propager un extrait d’une vidéo corroborant cette thèse ?

Entrepreneur, le super héros qui sauvera seul le Burundi commence à faire douter de l’utilité de l’école. Il suffit de se donner la peine de parcourir les commentaires de différents murs et pages qui ont relayé la trouvaille.

 Pour avoir élevé au piédestal un camionneur-commerçant  « qui n’a même pas le niveau dixième » et tourné en dindon de la farce un ingénieur « incapable de lancer son business », le locataire de Ntare a été peut-être (oui, peut-être) pris à la lettre par les pourfendeurs de l’école.  Comme quoi, un ingénieur serait moins utile à la nation qu’un camionneur vendant des avocats à Dar-es-Salam.

Nuance, nuance!

Un tel raccourci serait trop facile. Pire, dommageable sur le long terme. Le chroniqueur et essayiste  sénégalais aime à rire de cette nouvelle tendance qu’il traite de « supercherie ». Dans un sarcasme voltairien, les titres de ses publications sur le sujet sont plus qu’évocateurs : Le mythe du créateur de start-up qui va sauver l’Afrique est un leurre  ou bien encore ,Non, l’entrepreneur ne changera pas l’Afrique !

Loin de moi l’idée de prendre les propos de sieur Anne pour des vérités d’Evangile. La nuance qu’il apporte n’est pas cependant moins intéressante. Comme le souligne ce membre du think tank L’Afrique des idées, pour montrer les limites du mouvement « Tous entrepreneurs » et les dérives de ses apôtres,  « tout le monde ne peut pas être entrepreneur ». Indéniable. Et Dieu merci.

Il nous faut, me semble-t-il, un petit exercice de nuance. Quelques cas isolés ne devraient pas phagocyter la majorité. Comment rester indifférent devant le succès d’un Delphin et son charbon, devant la hargne d’une Josée et son projet de biogaz qui a déjà alimenté deux établissements scolaires ? Ils sont la preuve de l’utilité de l’entrepreneur.

Mais il ne serait pas moins profitable au pays si l’université de ressort de ces deux pépites, l’Université Polytechnique de Gitega, et ses homologues soient de vraies pépinières de jeunes compétents, de tous bords, de toutes disciplines. Le pays en a besoin. Un truisme qui ne devrait même pas être rappelé. 

Le pari de l’école n’est pas perdu et la galère d’une personne scolarisée est tout sauf  la preuve de l’inutilité de l’école. Il est bien de domaines où nous n’avons pas encore fait le trop plein.

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