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L’échographie : simple, salvateur, mais inaccessible

Les cas des malformations congénitales sont devenus légions. La naissance des enfants « siamois » à Gisuru et Mabayi, des hydrocéphalies à Bujumbura, les mamans continuent à être surprises à l’accouchement, alors que ces anomalies peuvent être détectées à l’avance par échographie. Où est-ce que ça coince ?

L’accouchement est un heureux évènement pour le couple, une joie immense pour la famille. Hélas, il n’y a pas de règle sans exceptions. Certaines mamans sont surprises d’accoucher des enfants malformés ou des triplets inattendus. Et l’une des raisons de cette mauvaise surprise est malheureusement qu’elles n’ont pas fait d’échographie lors des consultations prénatales (CPN).

Malgré que quatre CPN soient obligatoires pendant la grossesse, la 3ème enquête de santé et démographie du Burundi 2016-2017, révélait que seules 49 % des femmes enceintes effectuaient au moins quatre CPN et pour 47 %, la première CPN s’était déroulée avant quatre mois de grossesse. Ce qui traduit que 51 % des femmes enceintes n’ont pas eu quatre CPN, et que 53 % ont consulté très tardivement.

Le revers de la médaille

« Avoir accès à une échographie est un privilège qui n’est pas donné à tout le monde, vu qu’elle n’est pas sur carte d’assurance-maladie », explique Jacqueline Nduwayo, une jeune maman de Mbuye, qui venait d’accoucher d’un enfant mort intra-utérin, faute de n’avoir pas fait d’échographie. En effet, le prix d’une échographie varie entre 8 000 Fbu et 12 000 Fbu. Selon elle, même si elle avait eu les moyens, elle n’aurait pas pu faire les échographies car la commune ne dispose d’aucun appareil d’échographie. Il faut se rendre à Gitega, à l’hôpital Mutaho, pour y avoir l’accès, indique-t-elle.

Même pour ceux qui en font, il y a un hic. Pour Blandine Nduwayezu, une jeune maman de Bujumbura, « qui dit échographie, dit connaitre le sexe de l’enfant ». C’est pour cela qu’elle consulte vers la fin de la grossesse pour savoir le genre de vêtements acheter. Ce stéréotype burundais qui veut que l’échographie soit nécessaire uniquement pour connaitre le sexe du bébé, selon Dr Franck Arnaud Ndorukwigira, fait que plusieurs mamans vont à l’échographie tardivement, alors que celle-ci permet de détecter les anomalies fœtales si elle est effectuée entre le 3ème  et 4ème mois de la grossesse. 

D’après toujours ce médecin, l’échographie fœtale permet de détecter ces malformations quand elle est effectuée par un personnel qualifié. Or, il n’y a aucun cours en cursus médical au Burundi qui forme à l’échographie pratique. Ce sont donc des médecins généralistes qui pratiquent l’échographie à l’intérieur du pays. Même en cas de la détection d’une malformation fœtale incurable détectée au moment du diagnostic, les croyances religieuses handicapent la prise de décision. Une interruption thérapeutique « pour visée médicale » de la grossesse est perçue comme un crime odieux envers le créateur. La grande majorité des gens préfèrent laisser évoluer la grossesse quitte à souffrir avec l’enfant dans l’avenir.

Bien plus, les anomalies congénitales sont à l’origine des dépenses financières pour les ménages et pour le pays. A long terme, elles ont des répercussions importantes pour les sujets atteints, leur famille, les systèmes de soins de santé et la société burundaise en général. La pratique de l’échographie obstétricale devrait être une priorité de la politique de santé au Burundi.

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