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Relations burundo-rwandaises : allons-nous vers le dégel ?

S’il y a une actualité largement commentée cette semaine, c’est la rencontre entre les patrons de la diplomatie burundaise et celle du Rwanda. Une rencontre qui suit d’autres initiatives pour renouer les relations entre les deux faux-jumeaux. Mais alors, pourquoi cet élan de rapprochement ? Éléments de réponse dans cette analyse.

Les réseaux sociaux aidant, on a été nombreux à apprendre qu’à la frontière de Nemba-Gasenyi, un événement pour le moins inattendu venait de se passer. L’ambassadeur Albert Nshingiro, ministre des Affaires Étrangères et de la Coopération au Développement et son homologue rwandais Dr Vincent Biruta,  étaient en train de se rencontrer pour, affirment les deux partis, voir comment normaliser leurs relations : « Cette rencontre entre dans le cadre de la volonté partagée d’évaluer l’état des relations bilatérales entre les deux pays voisins et de convenir sur les modalités de leur normalisation », peut-on lire dans le communiqué sanctionnant cette visite de travail à l’initiative du Burundi.

De cette rencontre qui a vu aussi la participation des responsables des services de renseignements des deux pays et des représentants des forces de défense et de sécurité, l’on saura qu’il y a eu un huis clos entre les deux hommes. L’on apprendra aussi qu’ils se sont remis un message écrit chacun de la part de son gouvernement. Signe que les sujets qui fâchent furent abordés. 

Des signes avant-coureurs

Il faut le dire, on ne peut expliquer cette dernière évolution si l’on ne tient pas compte des dernières dynamiques. Des dynamiques qui vont dans le sens de préparer le chemin à la normalisation des relations entre les deux voisins. Ici, l’on se rappellera que lors de l’élection d’Evariste Ndayishimiye, Kigali l’avait félicité non sans réitérer son engagement pour la normalisation des relations. Pas plus longtemps encore, les responsables militaires des deux pays s’étaient rencontrés à Nemba en compagnie du Mécanisme Conjoint de Vérification Elargi de la CIRGL. 

La rencontre, même s’il est déplacé de faire le lien, a été suivie par la capture des combattants de RED Tabara sur le sol rwandais. Autant de dynamiques  qui donnent l’impression que les lignes bougent entre Kigali et Gitega. 

Un rapprochement qui peut s’expliquer

Cela fait cinq ans que les deux pays se regardent en chiens de faïence. Cinq ans de crise, c’est mauvais pour un tas de raisons, notamment en matière de sécurité mais également au niveau économique. Que les deux pays optent pour la normalisation, cela ne peut être que compréhensible. 

C’est compréhensible pour le Burundi qui, menacé par des rébellions, a intérêt à ce que la situation se (re)normalise, la coopération avec le Rwanda pouvant par exemple permettre de faire barrage aux attaques depuis l’extérieur. Également pour Kigali, redynamiser les échanges avec le Burundi pour le business et pour la mobilité des personnes, c’est l’un des facteurs qui expliquent ce rapprochement.  

Comme le Burundi, le Rwanda est soucieux de préserver sa sécurité. On a toujours en  mémoire ses inquiétudes par rapport à la question des FDLR et des rebelles des FLN dont Kigali soupçonne d’avoir des bases arrières au Burundi. C’est du moins l’analyse d’Innocent Ndereyimana, expert en Relations  Internationales. « Dans cet élan de normalisation, un  aspect  géopolitique y  trouve son compte. Ici, le Rwanda qui n’est pas en bons termes avec certains de ses voisins dans la région a besoin de normaliser ses relations avec le Burundi. ». Cependant, avertit l’expert, ce processus pourrait être battu en brèche par un éventuel comportement de deux pays face à d’autres événements politico-sécuritaires qui pourraient surgir : « À eux donc de se montrer à la hauteur des attentes de leur population qui  pensent, on l’espère, que ce conflit intéresse enfin. ».

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