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Une vie de « city »

Nous les rencontrons tous les jours, à l’entrée de nos bureaux, de nos maisons, des institutions que nous visitons chaque jour : banques, marchés, etc. Ces gardiens ou agents de sécurité que nous aimons appeler « city » sont souvent des hommes et des femmes très disciplinés, serviables. Sourire aux lèvres, ils nous saluent poliment et nous ouvrent la porte mais derrière leur visage jovial, se cache une réalité, malheureuse.

Claude est un jeune homme qui approche la trentaine. Son diplôme d’humanités en poche, ce jeune originaire de Musongati dans la province de Rutana débarque à Bujumbura en 2017. Il doit trouver un petit boulot pour se payer l’université. 

Pas de chance pour lui, il a eu 49% à l’ex-État, raison pour laquelle il n’a pas le droit de faire l’université publique. Parrainé par son cousin Michel, il décroche un job d’agent de gardiennage, qu’il va faire la nuit pour étudier la journée à l’Université des Grands Lacs. Tout change.

Les difficiles calculs

Il est 7 h du matin, Claude tient des bouts de papier qu’il feuillette soigneusement. Il a un examen à 8h et en attendant son collègue qui va assurer la relève, il révise ses cours. Son boulot ne lui facilite pas la tâche. Il est là depuis 17h de la veille. Il avait un cours l’avant-midi et n’a pas eu assez de temps pour revoir les notes. « Passer une nuit blanche à somnoler pour aller faire un examen le lendemain matin n’est pas chose facile », confie-t-il. Mais il essaie de s’adapter, « n’est-ce pas ça la vie ?», lance-t-il, arborant un sourire gêné. 

Pour Claude, ce travail est compliqué du fait qu’il y a beaucoup de contraintes. À part les longues heures de travail, le salaire déplorable ne lui permet pas de satisfaire ses besoins fondamentaux. Les 80 000 fbu qu’il perçoit à la fin de chaque mois s’évaporent dans ses mains. « Imaginez les difficiles calculs de répartir ce salaire en ration, loyer, minerval, et d’autres besoins primaires comme le savon,etc., c’est un casse-tête. Je hais le jour où je reçois ce minable salaire ! » Criblé de dettes, Claude peine à savoir qui rembourser en premier parmi « ses bienfaiteurs »

Tais-toi et vivote !

Claude s’est rendu à l’évidence. Il est très difficile de vivre comme un vrai gardien et agent de sécurité. « Nombreux sont les jours où je viens au boulot le ventre creux et je passe la nuit à somnoler à cause de la faim », fait-il savoir en ajoutant qu’en tant que gardien, il devrait avoir au moins un salaire qui lui permet de satisfaire ses besoins fondamentaux. « En réalité, ce travail exige le bien-être, la bonne santé. Mais personne ne semble le comprendre ».

Pour Claude, être agent de sécurité dans les sociétés de gardiennage burundaises, c’est oublier ses droits, son ego et admettre d’être traité de tous les noms. Il lance un appel au respect et à l’amélioration de leur condition de travail. « Même en étant « aba city », nous sommes aussi des êtres humains, intelligents et capables qui méritent du respect et qui ont des droits ».

 

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