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Burundi : comment faire barrage au coronavirus dans une société comme la nôtre ?

Avec trois cas de Covid-19 enregistrés au Burundi, l’heure est à la limitation de la propagation du virus. À côté des mesures instaurées par le gouvernement, impliquer les communautés de base serait un atout bénéfique. Analyse.

La réalité qu’on craignait a fini par nous rattraper. Le miracle burundais s’est envolé malgré nos prières. Eh oui, un signe que nous ne sommes pas plus chrétiens que les autres. On comprend donc ce qu’il peut y avoir d’inconfortable, de déconcertant dans l’annonce de ces trois cas positifs. Surtout au moment où parmi nos concitoyens, si certains ont commencé à s’inquiéter depuis des semaines, convaincus que ce phénomène a quelque chose de plus que menaçant, d’autres au contraire se sont engagés sur le chemin du déni et de l’incrédulité.

La sourde oreille

L’exemple typique est la situation en milieu rural. Il est 15h à Muramvya, commune Rutegama. En m’installant dans un bar du coin pour étancher ma soif, ma surprise est grande en constatant que ceux qui se lavent les mains avec l’eau savonneuse mise à leur disposition,se comptent sur les doigts de la main. Et cela ne semble pas les gêner. Ou bien, ils s’en moquent carrément du coronavirus ou ils ne sont pas bien sensibilisés. Pas de distanciation d’un mètre non plus entre les clients, le chalumeau continue à être partagé, et une bouteille d’urwarwa est échangée de mains en mains par cinq personnes. Pour Albert, la cinquantaine, le coronavirus est une maladie citadine. « Si la maladie s’attrape avec des mains sales, ntamurundi wo mu mitumba yicwa n’umwanda (la saleté n’a jamais tué un Burundais rural, ndr) », me lance-t-il, d’un air taquin.

Et si on mobilisait les communautés ?

La réalité est là. Par ignorance ou négligence, il y en a encore qui n’ont pas pris au sérieux la menace qui rôde. Avec la précarité de notre système de santé, notre salut viendra de la réussite des bonnes habitudes d’hygiène. La véritable arme devient donc la mobilisation communautaire pour que chaque Burundais s’approprie les mesures de protection individuelle et collective. L’expérience dans la gestion de la précédente épidémie d’Ébola en RDC, en témoigne.

Voici quelques pistes :

  • Former les crieurs publics et les déployer dans les rues et villages pour sensibiliser les citoyens peu soucieux des risques qu’ils encourent.
  • Former des jeunes volontaires et les groupes communautaires actifs au niveau des quartiers et villages pour une opération de sensibilisation porte à porte, et baliser les distances de précaution d’au moins un mètre par la cendre, la poudre de chaux ou la peinture partout où cela est nécessaire.
  • Impliquer l’engagement des performances citoyennes en déployant une chaîne de résilience via un challenge qui consiste pour chaque citoyen à informer une dizaine de personnes par jour, et afficher sur son profil de réseau social sa performance du jour.
  • sensibiliser les personnes relativement nanties pour soutenir le financement des besoins logistiques dans leurs quartiers et villages.
  • Instaurer une campagne médiatique d’envergure en y impliquant beaucoup plus les radios communautaires, avec accentuation de diffusion synchronisée des messages audiovisuels provenant des responsables religieuses, des leaders des partis politiques comme le CNDD-FDD et le CNL, sans oublier et ceux des artistes populaires comme Fizzo et Sat-B.

Avant que la situation n’empire et qu’il ne soit trop tard, chaque Burundais doit être une réponse. La diligence de la mobilisation communautaire peut sauver des vies. Au contraire, les hésitations et les lenteurs nous exposent encore plus à la maladie. Il est temps d’agir sans attendre.

 

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