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#ThePoliticianWeWant : Vugizo, « l’oublié »

À l’extrême sud du Burundi, dans la province Makamba, une commune semble être délaissée par les pouvoirs qui se sont succédé, au grands dam de ses habitants qui exigent d’être pris en compte.

9h. Nous sommes au chef-lieu de la commune Mabanda. L’équipe avec laquelle nous séjournons ne connaît pas Vugizo. Précaution exige, après le petit-déjeuner, c’est le check-in de la voiture, les pneus surtout. Vugizo ou Bukurira  (une sorte de sous-région traditionnelle) est réputée pour ses routes en piteux état, cela depuis que la commune existe, aime-t-on raconter.

10h. Nous prenons la route. À quelques kilomètres de la RN11 (Mabanda-Makamba), nous empruntons une voie en terre battue à droite, la route provinciale 407. En cours de route, impossible de rater la vue de la haute montagne séparant Mabanda de Vugizo. Pour les non-avertis, il est difficile de deviner qu’il peut bien exister d’autres localités derrière la montagne, en partie rocheuse. À l’autre bout de la rocheuse, bienvenue dans la « Suisse de l’Afrique ». 

Cet avant-midi là, contre toute attente, pour une commune connue pour son  froid intense, avec ses brouillards à couper à la hache, « Ça fait plusieurs jours  qu’il n’a pas plu, vous n’aurez donc pas de problème sur la route», nous rassure un policier à l’entrée de la commune. Tout à fait vrai. Avec ses routes aux mille nids de poules, la commune est difficilement recommandable pour certains véhicules en période pluviale. Et cela dans presque toutes les trois zones qui composent la commune. La question se pose avec acuité dans la zone Mpinga, bien que grenier en quelque sorte de la commune.

Vous avez dit la « Suisse d’Afrique » ?

L’expression a de quoi faire rire surtout lorsqu’on connaît la commune avec tous ses défis. Mais ça ne devrait pas, explique Gaspard, sexagénaire. Nous le rencontrons au petit centre de la colline Rabiro dans la zone éponyme de la commune : « Mu bu suisse ? Je ne saurais pas situer quand remonte l’expression mais sûrement que cela est en rapport avec le caractère pacifiste des habitants de la commune en comparaison au caractère moins belliqueux du pays helvétique ». Mais sinon, « la commune n’a rien de la Suisse, si ce n’est peut-être le froid », complète Sylvain, la trentaine entamée.

Pour le reste, Vugizo est une « commune perdue, enclavée », pour reprendre l’expression de Jeanne, enseignante au Lycée Communale Gishisha. « Avec ses multiples défis, la commune manque presque tout de l’essentiel pour son développement. De l’électricité pour commencer. Imaginer en 2019, le chef-lieu de la commune sans accès à l’électricité ? Comment voulez-vous qu’on se développe ? », s’inquiète la jeune enseignante. Résultat, la commune se vide de son monde, les jeunes surtout. « Même si on ne les a pas encore recensés, ils sont beaucoup à migrer chaque année. Direction, la Zambie, le Mozambique pour la plupart », avance d’un air désolé, Paul, un administratif de la commune. 

« De la paix et du pain »

Pour la petite histoire, contrairement aux autres régions du pays, la seule fois où la commune fut confrontée aux démons ethniques, c’était en 1972. À l’époque, une république (qui fut de courte durée) avait été proclamée à Matyazo, l’actuel site de la paroisse éponyme. Depuis, à part la guerre civile qui ne l’épargnera pas, les habitants de la commune se vouent une cohabitation pacifique à même de faire pâlir d’envie d’autres communes. 

Le seul défi qui hante la commune, c’est son développement : « Notre commune  a été oubliée et délaissée, et cela, depuis longtemps. La seule chose dont nous avons réellement besoin, c’est d’être pris en compte dans les différents projets. Un politique qui ne pensera pas à résoudre ça, il n’a qu’aller voir ailleurs », avertit Armand, 30 ans, au chômage depuis 5 ans. « À l’approche des élections, cela vaut aussi pour les politiques de l’opposition. Qu’ils ne nous vendent pas du vent. Des promesses de toutes les couleurs, on en a entendu assez. Désormais, on ne veut que la concrétisation. Et surtout que notre héritage pacifique ne soit pas troublé. De la paix et du pain après, c’est tout ce que l’on souhaite », semble compléter Diane, tenancière d’une petite boutique près du  chef-lieu de la commune sise à la colline Gikuzi.

Avec ses trois zones (Mpinga, Vugizo et Gishiha), la commune Vugizo est constituée de 20 collines de recensement. Frontalière de la commune Nyanza-lac au sud-ouest, Mabanda au sud-est, Makamba à l’est, Vyanda à l’ouest  et Bururi au nord, la commune Vugizo avait une population estimée à 45.223 habitants au dernier recensement de 2008.

 

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