Perchée sur les hauteurs de Bujumbura, deux chaînes de montagnes Mugongo et Manga se fusionnent pour former une seule commune, la commune de Mugongomanga.
Qui a déjà eu l’envie de visiter son école d’enfance ? Ayant fait le Lycée Étoile des Montagnes d’Ijenda, je me suis organisée avec des amies pour une petite visite. Sur la route nationale n°7, bordée de géants eucalyptus et des collines recouvertes de champs de thé d’une verdure admirable, une petite pancarte à 45 km de Bujumbura nous indiquent le chemin du chef-lieu de la commune. Nous dévions à gauche dans une route en terre battue et boueuse. Le climat rude, d’une froideur intense à grincer les dents, est caractéristique de la région de Mugamba. Un peu plus loin, un centre appelé « Rwibaga » apparaît devant nous, avec un hôpital et un marché, un des grands marchés de bétail au Burundi.
Un conseiller communal nous dévisage comme des étrangers, et nous accueille : « Bienvenue sur la ligne de la Crête Congo-Nil », lance-t-il à haute voix. Lui demandant la signification de Rwibaga, il nous raconte que jadis, les « Bagamba » que nous sommes, étions beaucoup attachés à la vache jusqu’à la considérer comme notre enfant. Voilà pourquoi plusieurs filles d’ici portent le nom de Nganinka (je vaux des troupeaux, ndr). Au marché, la viande de bœuf ne trouvait pas de clients, car disait-on alors, on ne mange pas son petit. Et les gens de Bujumbura montaient pour s’approvisionner, en disant qu’ils allaient acheter de la viande aho rwībâga (ndr, là où les vaches s’abattent elles-mêmes, à défaut d’avoir des gens pour le faire). « Et c’est ainsi que le nom du marché est passé de Gihuha à Rwibaga », explique gaiement le conseiller communal.
La forte fécondité, une entrave
Les yeux de notre conteur scintillaient de fierté quand une femme, Jacqueline, me reconnut. Normale, car j’y ai passé 7 ans au banc du lycée. C’était une voisine. Quelle surprise de la trouver enceinte, entourée de quatre gamins d’entre cinq et un an, à seulement 33 ans. « Tu n’es pas la seule à t’étonner, mon mari a refusé que j’adhère aux méthodes contraceptives, arguant qu’une progéniture nombreuse est une fierté et une sécurité, surtout que tous les quatre enfants sont des garçons », me confie-t-elle.
Pour elle, il faudrait un dirigeant qui insiste avec une loi à l’appui, pour limiter le nombre d’enfants à trois. « Avec un tel boom démographique, le développement du Burundi est incertain ». Après une vingtaine de minutes d’échanges, je m’éloigne en pensant à cette jeune dame de 33 ans, désormais vieille, qui jadis, faisait tourner les têtes de tous les jeunes étudiants.
Et si on travaillait 24h/24 ?
Nous quittons Rwibaga pour descendre au centre de négoce d’Ijenda. En chemin, on passe à côté du camp Mujejuru, un camp de la 120ème brigade. Le centre d’Ijenda est un petit bourg perché dans les montagnes dont l’atmosphère bon enfant et la jolie église Saint Aloys de briques rouges, à l’écart de la route, sont plaisantes à regarder. Les paysages alentour, entre les plantations de thé et de pomme de terre sont superbes.
Nous passons la soirée au bar Kubiyunze. 21h moins quelques minutes, un jeune commerçant du nom de Bernard, avec qui je discute, me fait signe de vider vite mon verre. « Sur ordre de l’administrateur, à 21h pile, tous les bars doivent être fermés », m’explique-t-il, avant de renchérir qu’avant cette décision, il travaillait jusqu’à 23h et gagnait bien plus qu’aujourd’hui. Pour Bernard, la trentaine, il aimerait avoir un leader qui comprend l’intérêt de travailler 24h/24 comme les autres pays de l’EAC, car « ils disent que la paix est totale, donc il faut en profiter pour le bien de l’économie », conclut le tenancier.
Des sites touristiques à prendre soin
Lundi, nous nous réveillons au petit matin pour monter sur le mont Manga. Là, on y découvre le géant émetteur-radio sur l’un des plus hauts sommets du Burundi. Avant de rentrer, on découvre les chutes de Mukobore, les ibigabiro vya Mwezi à Buhoro, l’usine du Thé d’ijenda et enfin le Lycée Étoile des Montagnes.
Mélissa, la vingtaine, s’exclame : « J’ai grandi au milieu du thé et j’ai toujours su à propos de l’enclos royal de Buhoro, mais découvrir une chute d’eau dans ma commune à 21 ans, est vraiment désolant. Même si la chute ne fait que 8m, c’est un site touristique qui peut rapporter plus au pays, via le tourisme ». Pour Antoine, un cultivateur rencontré dans le coin, « il faut un leader qui exploite en totalité les potentialités de la commune, pour le bien de tous ». Une visite chez un autre ami dans le quartier Buyenzi (appelé ainsi pour sa similarité au quartier swahiliphone de la capitale économique) clôture notre voyage.
Mugongomanga est l’une des 9 communes de la province Bujumbura. Elle est délimitée à l’est par la commune Rusaka, au sud-est par la commune Gisozi, au Sud par la commune Mukike, au sud-ouest par Mutambu, à l’Ouest par les communes Nyabiraba et Isare, et au nord par la commune Muramvya. Avec une superficie de 111 km², la commune avait une population de 27 985 habitants en 2008 reparties sur 14 collines, avec une densité de 251,3 habitant/Km². Située dans la région naturelle de Mugamba, la commune vit de l’agriculture d’altitude, de l’élevage.