Le 6 décembre 2019, une voix féminine s’était levée contre des soi-disant violences faites aux femmes en salle d’accouchement. Mais paradoxalement, personne n’est plus encensé au travail que l’équipe médicale. Ironie du sort, ce sont ces mêmes apôtres de Dieu qui deviennent les anges du diable en dehors des murs des hôpitaux. Une injustice qui me pousse à dire : halte ! Donnez-leur la considération qu’ils méritent.
« Muri abakoziyemwe ! Mwarahezagiwe !Ibiganza vyanyu ni vyeranda ! » (Vous êtes inégalables ! Vous avez été bénis ! Vos mains sont saintes !, ndr). Voici le genre d’éloges et de bénédictions que le médecin ou l’infirmier reçoit au sein des établissements de santé après un acte médical réussi. À la surprise générale, ce ne sont pas les mêmes éloges qui reviennent dans la communauté. Prenons le cas de ce qui se passe en maternité (le sujet qui fait grincer les dents).
En tant que médecin, je n’ai jamais entendu une mère, avec un beau bébé dans les bras, santé de fer, maudire ou se plaindre de l’équipe qui l’a suivie tout au long du travail. Étonnamment, il n’est pas rare d’entendre : « Toute la journée, une bande de stagiaires est passée à tour de rôle pour me faire un toucher vaginal » ou « La sage-femme m’a grondée. Elle m’a fait une épisiotomie sans consentement ».
La bande de stagiaires
Quand vous venez chercher les gynécologues les plus renommés de la capitale voire même de la sous-région, souvenez-vous qu’un jour, ils ont aussi fait partie de cette fameuse bande de stagiaires tant honnie et qu’ils sont devenus ce qu’ils sont aujourd’hui grâce à ces mères, tantes qui les ont laissé apprendre pour notre bien à nous tous. Souvenez-vous aussi que ce sont ces mêmes petits stagiaires qui assureront la relève un jour.
Alors, quand vous venez à l’hôpital, comprenez aussi que vous faites désormais partie de l’équipe médicale et laissez-les apprendre, les résultats seront pour vous.
Des actes réalisés sans consentement parfois justifiés
En maternité, y en a celles qui, mettant de côté les instructions du médecin, croient que mettre au monde est synonyme de « Pousser….Pousser….Pousser… » tel qu’on le voit dans les télénovelas. Hélas, ça ne se passe pas ainsi dans la vraie vie. Il y a des moments pour pousser. Quand vous poussez au moment inadéquat, vous exposez votre enfant à une souffrance, vous vous exposez vous-même au risque de déchirures susceptibles de provoquer des hémorragies difficiles à prendre en charge. Au final, vous exposez votre médecin aussi. Ce n’est qu’un exemple.
Quand de tels incidents arrivent, dans le feu de l’action, difficile de penser au consentement éclairé avant de poser un acte salvateur, fort probable que le ou la sage-femme vous gronderont même avant. Ce qui n’est pas une bonne chose en soi, mais un acte plutôt justifié devant le danger encouru et surtout dans un contexte de plateau technique souvent limité dans lequel nos chers médecins œuvrent. Mais on s’en sort bien tout de même. Plus encourageant encore, ça se termine avec un « Muragahezagirwa baganga bacu » (soyez bénis chers médecins).
Réalité fâcheuse. Mais….
Comprenez que les médecins ne sont pas des saints, encore moins des dieux, mais plutôt de pauvres gens avec un cerveau à deux hémisphères, qui se plantent comme tout le monde. Et ce sont ces êtres « maudits » qui mettent de côté leur bien-être et celui de leurs familles pour le bien-être d’autrui. Pour ne pas dire que le médecin ou l’infirmier a le droit de faire tout ce qu’il veut, soi-disant pour le bien-être du patient. Mais que dans certaines situations, pour des raisons évidentes d’urgence vitale, le médecin se verra passer directement à l’action sans vous en avoir parlé.
Demandez à un témoin de Jéhovah qui un jour, au bord du gouffre, en train de saigner avec son attestation de non-transfusion sanguine en poche mais qui a été sauvé parce que le médecin s’est passé de son petit papier, et lui a fait une transfusion sanguine . La vie n’a pas de prix. Enfin, on le sait bien, le médecin a l’obligation des moyens mais pas de résultats.